Tirzah, Trip9love…??? (Domino Recordings, 2023)
Voilà un album qui ne devrait pas, sur le papier, être aussi fascinant et troublant. Trip9love…??? est le troisième album de la Londonienne Tirzah Mastin, alias Tirzah tout court depuis qu’elle s’est taillé un recoin bien à elle dans la pop avant-gardiste faite aux machines avec sa chanson I’m Not Dancing en 2013. C’était un hymne aux heures tardives passées dans les soirées électroniques, mais surtout une sorte d’hommage aux perdant·e·s magnifiques, celles et ceux qui traînent là sans trop savoir ce qu’ielles y font mais avec la certitude d’être mieux dans le bruit et la fumée poisseuse que dans le monde de dehors, fait de trop de préoccupations. « Je ne danse, pas, je me bats », chantait alors la jeune Tirzah sur un beat très lourd et haché hérité de l’après dubstep (lire l’épisode 75 de la saison 1, « The Bug et Dis Fig, one dubstep beyond »). Et c’était à peu près tout, dans cette production chétive mais brillante qui jouait sur des micro-événements qui relançaient sans cesse cette chanson déstabilisante dont on ne peut plus se défaire après la première écoute.
Dès ces débuts comme cachés sous un sweat à capuche, Tirzah a ainsi étalé son monde musical fait d’électronique faussement dansante et de structures sonores complexes héritées de ses études de musicienne destinée aux orchestres clinquants. Une vraie musique de nerd que tout le monde évite à l’école à part les trois autres bizarres.