Smote, A Grand Stream (Rocket Recordings, 2024)
C’est l’été, vous êtes tranquillement assis dans l’herbe au bord d’un ruisseau écossais. La journée à la ferme a été chargée sous le soleil qui tape et cette bière qui a rafraîchi dans l’eau qui clapote est un plaisir intense. De ce souvenir estival, certains feraient des chansons bucoliques à la guitare sèche ou un hymne aux campagnes de droi… euh, éternelles façon Trois cafés gourmands. Le Britannique Daniel Foggin, alias Smote, a lui vu et entendu autre chose à l’été 2023, qu’il a passé dans une ferme près de Kelso, une petite ville à deux pas de la frontière entre l’Écosse et l’Angleterre. Dans l’eau qui s’écoule inexorablement, il a entendu un rythme qui fourage encore et encore, qui tourne et tourne sans s’arrêter et pourtant n’est jamais tout à fait le même. Et dans l’irisation du soleil à la surface de l’eau, entrecoupée par l’ombre des arbres, il a vu des variations infinies, des flashs de lumière et des ondes où le regard se perd. Partout, c’était pour lui de la musique qu’il a par la suite tenté de retrouver dans son troisième album, A Grand Stream, qui est l’une des très belles surprises de cette rentrée 2024. N’imaginez donc pas un disque de folk naturaliste qui fantasme la campagne : Daniel Foggin explore depuis le début des années 2020 les mondes du psychédélisme électrique, des ondes électroniques tortueuses et du drone metal.
Dans les premiers temps, Smote était pour lui un projet un peu dilettante qu’il mettait à disposition dans son coin sur Bandcamp, jusqu’à ce que Matthew Baty, le chanteur du groupe de stoner Pigs Pigs Pigs Pigs Pigs Pigs Pigs (oui c’est vrai, super nom) ne le recommande au patron de Rocket Recordings, une maison qui sait reconnaître la beauté dans la furie et dont on a déjà parlé ici avec le collectif suédois masqué Goat (lire l’épisode 104 de la saison 1, « Goat et The Mummies, cellules de déguisement »).