Goat, Headsoup (Rocket Recordings, 2021)
En 2012, un disque vraiment bizarre a débarqué de Suède. L’album s’appelait World Music pour se moquer ouvertement de cette catégorie qui, depuis les années 1980, rassemble pour l’industrie de la musique un folklore exotique à destination des pays riches. Lui jouait toutes les musiques en même temps dans un maelström frénétique de psychédélisme, de funk, de grandiloquence égyptienne ou éthiopienne et de percussions voodoo fantasmées. Le groupe s’appelait Goat et on ne savait rien de lui, ni les noms des musiciens et musiciennes, ni leurs visages, systématiquement cachés par des costumes de chamans nordiques drogués, ni même l’histoire de la formation. Il y avait bien un récit officiel qui accompagnait ce disque, mais il était si ouvertement délirant qu’il n’a été repris que par les médias vraiment fainéants (ça fait déjà beaucoup de monde). En gros, les membres de Goat, qui sont entre trois et quinze selon les jours, seraient les enfants de musiciens qui « jouent ensemble depuis trente ou quarante ans » dans la petite ville de Korpilombolo, dans le nord-est de la Suède, près de la frontière avec la Finlande, dans une communauté marquée par un chamanisme datant d’avant la christianisation du pays. Leurs enfants, qui se connaissent depuis toujours, ont fini par prendre la relève et World Music serait leur première communication avec le monde extérieur.
En 2021, on n’en sait pas beaucoup plus sur Goat, à part qu’ils sont de Göteborg et pas du tout de la campagne polaire, et que tout cela a commencé comme une blague lancée par des musiciens qui allaient de groupe en groupe sans grand succès, et c’est très bien comme ça.