Caribou, Honey (City Slang, 2024)
Il y a d’office quelque chose de troublant dans Honey, le huitième album du Canadien Daniel Snaith sous le pseudonyme de Caribou, et c’est déjà beaucoup après bientôt vingt-cinq ans de musique en solitaire. Dès le premier morceau, Broke My Heart, puis dans tout cet album de house surélevée de refrains pop-soul sucrés, on se demande qui chante. Les voix féminines ne sont pas créditées et il est même difficile de savoir si elles appartiennent à une seule personne ou à une plusieurs… Curieux, quand les plateformes de streaming ont fait des featurings un outil essentiel de rencontre des communautés de fans. Mais la réponse est en réalité très simple : ces voix féminines n’existent pas. Elles ont été créées par Dan Snaith à l’aide d’outils de clonage vocal par intelligence artificielle, et c’est donc lui qui chante. Eh oui, exactement ce que Les Jours, toujours en avance sur le game, vous racontaient dans la série L’attaque des clones vocaux, qui se demandait si cette technologie désormais très au point serait la première manifestation audible du surgissement de l’IA dans la création musicale populaire. En ce sens, Honey est donc un album historique qui n’est pas le premier à utiliser ouvertement l’IA (il y a eu Holly Herndon ou Yacht avant), mais le premier à ce stade de notoriété capable de remplir tranquillement un Zénith ou une grande scène de festival transgénérationnel.
Dan Snaith a donc chanté lui-même ces chansons, avant de cloner sa voix en versions féminines diverses.