À l’heure du bilan, ce n’est pas folichon. En mars, au départ de cette série, les frontistes se rêvaient au plus haut dans l’Extrême Sud, mais ils la concluent dans une ambiance de fin de bal, contraints de vider les verres de rosé tièdes en se satisfaisant des miettes : Gilbert Collard a sauvé son mandat, Robert Ménard envoie son épouse au Parlement et monsieur Marine Le Pen, Louis Aliot, est élu par surprise à Perpignan. Mais le butin reste maigre, surtout qu’après le forfait de Marion Maréchal-Le Pen, le FN perd sa circonscription de Vaucluse et ne compte aucun élu sur « ses » terres de Provence.
Le FN rétorquera que le verre de rosé est aussi à moitié plein. Car après l’échec à la présidentielle, malgré un record de plus de 10 millions de voix (lire l’épisode 11, « Les frontistes ont les boules »), et un premier tour des législatives décevant (lire l’épisode 17, « Un soufflet sur la flamme »), huit frontistes se retrouvent à l’Assemblée. Certes, moins que les dizaines d’élus un temps espérés, mais plus que ce qu’on envisageait la semaine dernière, où certains militants craignaient de n’y voir que Marine Le Pen, la cheffe revigorée par sa confortable élection à Hénin-Beaumont dimanche (avec 58,6 % des voix). En passant de deux à huit, le Front national quadruple son nombre d’élus. Soit 300 % d’augmentation. Qui dit mieux ? Cela représente son meilleur score avec un scrutin majoritaire. En 1986, lorsqu’avait été mise en place la proportionnelle intégrale aux législatives, le FN avait obtenu 35 députés.
Ce résultat cache un triple échec : le Front national n’a pas conquis le pouvoir, il ne représente pas la première force d’opposition (qui reste l’apanage de la droite classique), et n’incarne même pas cette forme de « colère anti-système » que Jean-Luc Mélenchon, nouveau député de Marseille, lui a chipée en réalisant deux fois mieux, avec 17 élus qui lui permettent de créer un groupe. N’ayant pas atteint la barre des quinze élus pour en former un, le Front national sera réduit à faire du bruit. Et à se déchirer dans l’explication de texte qui s’ouvre au parti et que Florian Philippot, battu largement à Forbach (Moselle) avec 43,04 %, attaquera en position de faiblesse, surtout qu’aucun de ses disciples n’est élu. Les mois à venir seront aussi marqués par des rendez-vous judiciaires très embêtants pour le FN, avec le renvoi en correctionnelle pour le financement des campagnes de 2012 et l’affaire des assistants parlementaires européens.
Donc, ça sent un peu le pâté, mais nous, c’est le Sud qui nous intéresse.