Imaginez un militant anti-OGM qui travaille pour Monsanto. Vous aurez du mal à le prendre au sérieux. Imaginez maintenant quelqu’un qui se présente comme militant de la démocratie participative et qui met en œuvre par ailleurs une immense consultation dont les questions – rédigées par le gouvernement – sont biaisées et servent à relégitimer ledit gouvernement. On est d’accord : il y a un problème. Eh bien cette deuxième situation, contrairement à la première, n’est pas hypothétique : c’est la vie de Cyril Lage, fondateur de l’association Démocratie ouverte et président de l’entreprise Cap Collectif, qui a été choisie par le gouvernement pour faire tourner la plateforme du grand débat, qui ferme ce week-end. Cette contradiction nous a conduit à enquêter sur ce personnage. On s’est intéressé précédemment à la première partie de sa carrière professionnelle, dans le lobbying et la communication d’influence (lire l’épisode 29, « Le trouble architecte de la plateforme du grand débat »). On va désormais vous raconter comment Cyril Lage s’est fait passer pour un militant désintéressé de la « civic tech », attaché aux valeurs de la communauté des « libristes », avant de tourner patron de boîte avant tout motivé par la croissance de son chiffre d’affaires. De ce côté, c’est une réussite : selon nos informations, Cap Collectif va toucher un million d’euros pour avoir mis en place le site du grand débat.
Tout démarre à la fin des années 2000.