Le respect est-il mort ? On les espérait toutes sur le pont, multipliant les analyses pour ne rien dire, additionnant les duplex depuis l’Élysée pour dire que là oui, peut-être, bref, pratiquant ce journalisme d’ameublement destiné à remplir l’antenne et à faire monter la sauce en attendant qu’enfin tombe la décision d’Emmanuel Macron, mais non, rien. Sur BFMTV et LCI, ce lundi matin, on est sur la guerre de Poutine en Ukraine ; sur CNews, on s’indigne du « burkini de la discorde ». Et l’attente de la succession de Jean Castex alors ? Tout le monde s’en tape. En éternels optimistes, Les Jours se sont dit que peut-être les chaînes info avaient appris. Qu’à force de se faire mener en bateau et tourner en bourrique par le maître des horloges, guettant le moindre signe, la moindre fumée, la moindre phrase, elles s’étaient lassées. Ça a tout de même duré trois semaines depuis l’élection d’Emmanuel Macron, le 24 avril, cette affaire de nouveau Premier ministre conclue par la nomination d’Élisabeth Borne.
Souvenez-vous du lundi 15 mai 2017 : elles avaient tenu le crachoir une demi-journée durant avant que, à 14 h 53, soit annoncé, par le secrétaire général de l’Élysée Alexis Kohler et en huit secondes, le nom d’Édouard Philippe (lire l’épisode 1 de la saison 1 d’In bed with Macron). L’apogée, un rien décevant, d’un bien bel exercice journalistique où, sept heures durant, toutes les palettes du métier ont été déployées, sans oublier bien sûr le suivi du futur impétrant à moto dans Paris. On se souviendra de ce commentaire d’un journaliste sur le plateau de BFMTV, totalement au bout du scotch : « Peut-être qu’on nous balade, nous les journalistes, en nous faisant suivre Édouard Philippe alors que c’est une fausse piste. » Cinq ans après, la leçon a été reten… Eh bien non, bien sûr que non, évidemment que non. Un peu après 15 heures, le cirque a repris, pétaradant aux fesses de la voiture de Jean Castex s’en allant présenter sa démission à Emmanuel Macron. Tandis que le nom d’Élisabeth Borne encore orné d’un point d’interrogation apparaît. Sur BFMTV, il n’y a plus de place que pour ça : les Duhamel tonton (Alain) et neveu (Benjamin) sont dégainés simultanément, de même que Christophe Barbier, Maurice Couve de Murville est invoqué par Duhamel (le tonton) à propos d’on ne sait plus quoi, et l’écran n’est composé que de la démission de Castex.