«Je tiens à exprimer mes salutations les plus sincères et les plus chaleureuses au Premier ministre Modi en cette fête de l’indépendance de l’Inde. C’est un plaisir de voir l’Inde exceller sous votre direction dynamique à un moment où le monde se bat contre le Covid-19. » Ce message amical, c’est celui de l’eurodéputé Rassemblement national Thierry Mariani, dans une vidéo publiée sur Twitter le 14 août dernier par le compte du journal en ligne EU Chronicle. Vous n’avez jamais entendu parler d’EU Chronicle ? C’est normal : c’est l’un de ces faux médias créés de toutes pièces pour servir les intérêts de l’Inde et qui est au cœur des « Indian Chronicles », les révélations de l’ONG EU DisinfoLab, auxquelles Les Jours ont eu accès, qui mettent en lumière une incroyable machine de guerre informationnelle et d’influence (lire l’épisode 1, « Delhi, nid d’espions »).
L’ancien ministre des Transports de Nicolas Sarkozy ne sera pas le seul à manifester sa sympathie au Premier ministre indien ce jour-là. L’ancien vice-président polonais du Parlement européen Ryszard Czarnecki (PIS, parti conservateur et eurosceptique) et le député européen italien Fulvio Martusciello (Forza Italia) participeront également l’un et l’autre à l’exercice, dans des vidéos diffusées le même jour par le même compte Twitter. Thierry Mariani sera, par contre, le seul à récidiver un mois plus tard en tournant une autre vidéo pour, cette fois, souhaiter un bon anniversaire à Narendra Modi. Publiée où ? Toujours sur le compte Twitter d’EU Chronicle. « C’était à mon initiative. C’est mon assistante qui a pris la vidéo dans mon bureau », se contente d’expliquer aux Jours l’eurodéputé. D’abord, la même idée que deux autres députés pour la première vidéo. Puis une démarche spontanée pour la seconde. Étonnant.
EU Chronicle n’est pas qu’un compte Twitter. Derrière, il y a un jeune journal, disponible uniquement en ligne et apparu pour la première fois au mois de mai 2020. Malgré un site web au design très basique et une présence sur les réseaux sociaux très limitée (seulement 400 abonnés sur Twitter, pas de page Facebook), le journal ne cache pas ses ambitions. Il fait même une promesse à ses lecteurs, celle d’entrer « dans un monde de connaissances, sagesse et vérité » et de se confronter à l’actualité d’une manière tout à fait nouvelle. En regardant plus en détail, le site semble n’agréger que des dépêches ou des communiqués de presse. Étrange. Pourtant, il assure travailler avec de vrais