Avant les trois explosions qui ont eu lieu ce vendredi 19 avril, près d’une base militaire de la région d’Ispahan, en Iran, il y a eu le 1er avril. Ce jour-là, un F35 israélien qui volait au-dessus du plateau du Golan – occupé par Israël en 1967 et vidé de sa population syrienne, puis annexé en 1981 – tire en direction de la Syrie. Il n’y a que cinquante kilomètres à vol de missile pour rejoindre Damas, et le quartier gouvernemental et bourgeois de Mazzeh, où se situe l’ambassade iranienne. Une annexe consulaire a été soufflée, tuant seize personnes, dont sept militaires iraniens. Parmi eux, trois généraux, dont Mohammad Reza Zahedi, commandant pour la Syrie et le Liban des Forces Al-Qods, la branche extérieure des gardiens de la révolution.
Selon une enquête du New York Times, le plan était en préparation depuis deux mois et avait été approuvé le 22 mars par le cabinet de guerre israélien. Formé le 11 octobre, celui-ci contient Benyamin Netanyahou, le ministre de la Défense Yoav Gallant, ainsi que le chef d’Unité nationale, l’un des principaux partis d’opposition, l’ancien chef d’état-major Benny Gantz – devenu, malgré son manque de charisme, le politicien préféré des Israéliens. Les dirigeants n’y voyaient qu’une autre salve dans la guerre couverte avec l’Iran, sous-estimant l’outrage fait au régime des mollahs. Qui, de fait, y a publiquement vu une attaque sur son territoire souverain, nécessitant une réponse. Dans les dix jours qui ont suivi, l’hypothèse d’une attaque directe et puissante de Téhéran s’est précisée : elle serait assez forte pour indiquer un changement de paradigme, mais pas pour causer une guerre directe.
Les observateurs les plus fins auront remarqué un signe avant-coureur de la réponse iranienne. Vendredi 12 avril au matin, des camions sont arrivés devant la résidence du milliardaire américain Simon Falic, dans la rue Mordechai-Caspi, l’une des plus exclusives de Jérusalem. Les déménageurs ont transporté des meubles et des frigos sous escorte policière, préfigurant l’arrivée d’invités de marque dans ce complexe luxueux de seize chambres, qui bénéficie d’une vue imprenable sur la Vieille Ville – et d’un bunker antinucléaire enterré. Quelques heures plus tard, le couple Netanyahou emménageait, comme pendant le mois qui a suivi le 7 octobre (lire l’épisode 4, « Netanyahou enfoncé dans les tranchées »), laissant leurs trois autres résidences officielles, subventionnées par le contribuable, vides.
Les drones iraniens ont décollé le lendemain vers 21 h 45 heure locale, la presse israélienne estimant qu’il leur faudrait neuf heures pour parcourir les plus de 1 000 kilomètres qui séparent les deux pays.