Tenancière de « maison de galanterie », passionnée d’opéra et auxiliaire de police
judiciaire, Lucienne Goldfarb, dite « Katia la Rouquine », déboulait au 36 avec ses yeux bleus et son fume-cigarettes, ses jupes de grands couturiers et son Chanel n° 5, puis ouvrait les portes d’un coup de talon aiguille pour donner ses tuyaux au service idoine. Comme chez elle au quai des Orfèvres, la délurée connaissait l’organisation de la PJ et les patrons sur le bout des doigts, et abreuvait toutes les brigades pour travailler tranquillement. Ainsi, Claude Cancès, jeunot débarqué à la Mondaine en 1964, a tout de suite été affranchi par son chef sur le statut privilégié de la plus grande maquerelle de Paname
: « Tu ne t’imagines pas ce qu’elle balance, et pas qu’à nous ! Elle entend parler d’une équipe de voyous, elle va voir l’Antigang. Si c’est les stups, elle convoque le chef de section. On m’a même raconté qu’elle balance aux RG et aux espions du SDECE (le Service de documentation extérieure et de contre-espionnage, l’ancêtre de la DGSE, ndlr) », raconte-t-il aux Jours.

Officiellement depuis 1947, Lucienne Goldfarb bénéficie d’un « condé » de la Mondaine, c’est-à-dire d’une permission de se prostituer en échange de renseignements. Dans son livre, Katia la Rouquine (Balland, 1976), l’informatrice raconte son parcours de secrétaire devenue pute
pour un tailleur Chanel. Elle a ensuite continué à tapiner devant les vitrines des beaux quartiers pour atteindre en accéléré son