Les deux compères ont appartenu au nec plus ultra de la Mondaine, au mythique « groupe cabarets » ayant traversé le XXe siècle et perduré jusqu’à nos jours. C’est aux Deux-Palais, à côté du 3 rue de Lutèce où crèche la brigade que Jean-Claude Moreau, 73 ans, et Jean-Marie Schmeltz, 60 ans, me donnent rendez-vous à leur place attitrée : au bout du zinc, devant un verre de blanc. Le premier – chef du groupe de 1985 à 1998 et fils de viticulteurs bourguignons –, est une fine gueule que le second appelle « Papa ». À la retraite, Moreau, qui revient de parties de golf en Corse, arbore un magnifique polo Lacoste blanc aux broderies vertes « Puntacana ». Et Schmeltz, reconverti dans la vente de casseroles
depuis son départ de la brigade il y a deux ans, porte une tenue sportwear. De retour sur ses terres spécialement pour Les Jours, le tandem de choc m’entraîne à La Cochonaille, repaire de poulets du 36 et de magistrats du palais, rue de la Harpe à Saint-Michel, où le menu gargantuesque du patron plafonne à 20 euros, pichet de vin compris. Habitués à la cave voutée, adossés au mur de pierre sous une « médaille de la courtoisie française », les deux se souviennent de ces nuits de permanence aux cabarets à tourner dans les discothèques, clubs à strip-tease et bars à hôtesses, à bord de la voiture avec chauffeur
de la Mondaine.

En cas de souci avec un client, les patrons de boîtes téléphonaient à l’état-major de la PJ, surnommé au 36 l’étage des morts
, lequel appelait le véhicule des « cabarets ». Resté sobre au volant, le conducteur alertait alors le duo, parti boire un verre dans un établissement : Une coupe de champagne ou un whisky pour ne pas froisser le patron mais surtout du Perrier ou Vittel car on ne peut pas se permettre de picoler toutes les nuits.
Il faut rester d’aplomb pour répondre aux demandes des tenanciers d’établissements qui préfèrent de loin ces civils de la Mondaine aux « bleus » trop voyants des commissariats. Il s’agit de tenir à l’œil quelque 200 boîtes de nuit et une centaine de bars à hôtesses où les actes sexuels sont interdits
. Il faut veiller aussi au respect des horaires de fermeture, en général 2 heures : Pour contourner la loi, on a vu la création des afters qui reprenaient à 4 heures.
Il faut passer dans tous les débits de boisson qui veulent obtenir une licence IV pour vendre de l’alcool, passer de la musique ou monter une piste de danse, afin d’émettre un avis à la préfecture
.