La parole rare n’aura pas tenu longtemps. Pour corriger le tir après un été chaotique, Emmanuel Macron a enjoint ses ministres à mieux expliquer leur action. En cette rentrée, Jean-Michel Blanquer, ministre de l’Éducation, a donc entamé une tournée des plateaux télé et matinales radio. Le Premier ministre, Édouard Philippe, s’astreint à quitter Matignon deux fois par semaine, pour de très médiatiques déplacements nationaux – cette semaine, il a enterré le RSI (Régime social des indépendants) à Dijon, avant de filer à la foire de Pau. En coulisse, les conseillers chargés de la communication dans les cabinets ministériels sont à pied d’œuvre pour fabriquer les éléments de langage, décliner les messages en ciblant les supports, monter les conférences de presse, cadrer la presse lors des déplacements… Ces tâches stratégiques impliquent une grande proximité avec les ministres. Certaines agences de communication, où ces conseillers ont souvent été formés ou ont travaillé, n’hésitent pas à tenter d’influer sur le pouvoir politique via leurs anciennes recrues.
Au cabinet de Bruno Le Maire, le ministre de l’Économie, Dimitri Lucas, croisé à la com de François Fillon durant la présidentielle, est chargé de répondre aux journalistes, et Bertrand Sirven chapeaute la stratégie de communication. Les deux conseillers ont déjà travaillé avec Le Maire pendant sa campagne pour la primaire de la droite, en fin d’année dernière. Contrairement aux hauts fonctionnaires qui trustent les postes de dircab ou de conseillers techniques, les communicants des cabinets ministériels sont rarement énarques, ni issus des grands corps. Ils sont souvent recrutés pour leur fidélité avec le ou la ministre. Bertrand Sirven a ainsi passé dix ans dans les soupentes des ministères pendant que la droite était aux affaires. D’abord comme conseiller presse de Dominique de Villepin, au ministère de l’Intérieur puis à Matignon. En 2007, il atterrit au cabinet de Bruno Le Maire aux Affaires européennes, puis à l’Agriculture.

Cinq ans plus tard, la victoire de la gauche porte un coup d’arrêt à sa trajectoire en cabinet. Pas d’angoisse pour autant, ni de longue attente dans les files de Pôle emploi. L’agence Havas l’attend à la sortie et l’embauche comme directeur associé. Un grand classique. Ceux qui ont travaillé dans les cabinets sont censés avoir constitué de précieux carnets d’adresses. Ce sont des recrues précieuses pour les agences qui cherchent des relais au cœur du pouvoir.