Ce dimanche, les électeurs des Jours, personnages de nos séries que nous avons suivis depuis des mois dans leurs hésitations, leurs revirements et leurs interrogations de citoyens appelés aux urnes, sont passés dans l’isoloir. Ils racontent.
Pendant des années, Sophie avait cessé de se déplacer le jour des élections. Peu à peu, elle s’était éloignée de la politique. Tout a changé depuis les attentats du 13 novembre 2015. Sophie était attablée au café du Bataclan quand les assaillants sont arrivés. Elle a croisé le regard d’un tireur avant de se réfugier à l’intérieur du café, puis de s’enfuir une fois la police sur les lieux. Depuis, Sophie a décidé de se réinscrire sur les listes électorales. À nouveau, elle s’est sentie « concernée ».
Au départ, Sophie n’avait pas envie de gâcher sa voix, de voter pour quelqu’un qui n’avait pas de chance de se qualifier. Elle voyait ça comme un vote perdu. Puis, samedi soir, elle a vu les messages des Français de l’étranger qui se mobilisaient pour voter, peut-être davantage que ce qu’elle avait imaginé. « Cette implication massive, ça m’a convaincue de voter selon mes convictions. Ma victoire à moi, c’est cette mobilisation importante. » Ce dimanche, elle a voté pour Benoît Hamon, le candidat dont le projet lui parle le plus. « C’est le seul qui me donne l’impression de vivre dans le même monde que moi, dans la vraie vie. » Il lui semble « le plus concret » et « le plus honnête dans sa démarche », dit-elle en espérant que le regain de mobilisation lui soit profitable.
Et puis il y autre chose. Après l’attentat sur les Champs-Élysées, où un policier a été tué le jeudi 20 avril (lire l’épisode 24 de la série En relation avec une entreprise terroriste), le candidat socialiste a posté un poème de Louis Aragon. « J’ai été très touchée par cette réaction, de brandir la poésie face à la menace », confie aussi Sophie, qui accuse le coup à chaque attaque depuis le 13 Novembre. Elle l’assume : dans son choix de ce dimanche, « le rationnel, et l’émotionnel » se sont emmêlés.
Mercredi, André, 61 ans, était venu voir Marine Le Pen pour son dernier meeting à Marseille. Il était encore indécis, « à 50 % » expliquait-il (lire l’épisode 7 de la série Extrême Sud). En 2002, il avait manifesté contre Le Pen, le père. En 2017, il envisageait sérieusement de voter pour Le Pen, la fille. Les choses ont changé, dit-il. Avec sa compagne Marie, 57 ans, ils évoquent les attentats. Parlent beaucoup de l’insécurité.