«À quand un procès sur le plastique ? », nous demandions-nous à la fin du précédent épisode (« Plastique, ne sais-tu pas que tu es toxique ? »). En fait, il a déjà eu lieu… C’est le scandale des perfluorés de Parkesburg, en Pennsylvanie, jugé aux États-Unis. Raconté par le New York Times en janvier 2016 dans un article saisissant, il a été mis en images récemment dans le film Dark Waters. Fabriquées depuis les années 1940, les substances polyfluoroalkylées et perfluoroalkylées, plus connues sous leur abréviation anglaise « PFAS », regroupent une large famille de molécules – plus de 4 700 – aux miraculeuses propriétés : imperméabilisante, antitache, antigraisse, antiadhésive… En quatre-vingts ans, les PFAS, extrêmement mobiles et quasiment indestructibles, se sont répandus partout dans l’environnement et dans la chaîne alimentaire. Que l’on habite à Brest ou à Bogotá, on en boit au robinet, on en mange et on en respire dans notre salon. Ils s’accumulent dans nos organismes et y demeurent des années, au point qu’ils apparaissent désormais dans la littérature scientifique sous le sobriquet de « forever chemicals », les « chimiques éternels ». Les plus célèbres sont le PFOA (acide perfluorooctanoïque) et le PFOS (acide perfluorooctanesulfonique). En 2015, 200 scientifiques ont réclamé « la limitation de leur production et de leur usage », tout en prenant soin d’alerter des dangers des « PFAS à courte chaîne », présentés comme des alternatives. Le FluoroCouncil, la branche de l’American Chemistry Council pour les fabricants de composés perfluorés, a immédiatement rétorqué que les craintes émises sur ces alternatives n’étaient pas assez « robustes », mais surtout qu’il était impensable de se passer de ces substances présentes dans « les avions, les voitures et les smartphones » et « essentielles à la vie moderne ».