C’était le mini-suspense de la semaine au Sénat : la droite (c’est-à-dire Les Républicains) allait-elle s’entendre avec l’Union centriste (UC), dont la ligne politique n’est clairement pas à gauche, pour faire tomber l’article 3 de la loi « immigration » ? L’enjeu n’est pas mince : c’est l’une des principales dispositions « de gauche » du texte gouvernemental puisqu’il prévoit de régulariser automatiquement les étrangers en situation irrégulière qui travaillent dans les métiers dits « à tension » (lire l’épisode 1, « L’immigration met la Macronie en tension »). Eh bien, le résultat a été sans surprise : la réponse est oui. Un accord a eu lieu entre les deux composantes de la majorité sénatoriale. L’article 3 a été supprimé mercredi soir et remplacé par un article 4 bis qui prévoit, comme aujourd’hui avec la circulaire Valls, des régularisations au cas par cas. Cela veut-il dire que le gouvernement s’est fâché tout fort et qu’il a promis de rétablir la mesure quand le texte passera à l’Assemblée nationale ? Pas du tout. Le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin, qui défend le texte au palais du Luxembourg, était tout content mercredi soir, expliquant que l’accord UC-LR reprenait « 50 % » de ses objectifs et qu’il reflétait « l’esprit de compromis » qu’il appelait de ses vœux. Est-ce un recul gouvernemental ou Darmanin se félicite-t-il à raison ? Avant de tout vous expliquer, faisons un retour sur les débats de cette semaine.
D’abord, un constat. Au Sénat, ce n’est pas comme à l’Assemblée nationale. On ne crie pas, on ne tape pas sur son pupitre, et les hommes portent des cravates, même les nouveaux venus comme l’écolo Yannick Jadot ou le communiste Ian Brossat. Cependant, avec la loi « immigration », les esprits, surtout à gauche, se sont beaucoup échauffés. Il faut dire que la droite a profité du texte pour se faire plaisir. L’immigration, c’est sa marotte. Les immigrés, des boucs émissaires bien faciles. Alors, sans craindre de se faire retoquer à l’Assemblée nationale ou de se faire censurer par le Conseil constitutionnel, les sénateurs LR ont fait passer une série d’amendements n’ayant pas grand-chose à voir avec le texte initial pour durcir les conditions de vie des personnes étrangères, qu’elles soient en situation irrégulière ou non.

Face à cela, le gouvernement est resté étrangement passif : « avis de sagesse »