«Non au Front national », « Ni FN, ni Macron », « Peste ou choléra ? Front social »… Sur la place de la République en ce 1er Mai parisien d’entre-deux-tours, les slogans anti-Le Pen (mais aussi anti-Macron) côtoient les traditionnels stands de merguez, vendeurs de L’Humanité et soutiens à des causes oubliées, qu’elles soient kurdes, tamoules ou marxistes-léninistes. La question du Front national est à la fois partout et nulle part. Il ne surprend plus. Effraie encore. Mais, en termes de mobilisation ou de slogans, n’arrive plus à faire l’unanimité contre lui. En 2002, face à Jean-Marie Le Pen, le 1er Mai s’était imposé comme point d’orgue unitaire de mobilisations souvent spontanées. Environ 1,5 million de personnes avaient pris la rue, dont 500 000 à Paris. Ce lundi, 142 000 personnes ont défilé en France, 30 000 à Paris selon la préfecture de police, qui dénombrait 16 000 manifestants l’an dernier, en plein mouvement social contre la loi travail.
Camille et Antoine, 27 et 30 ans, viennent « tous les ans depuis qu’ils sont petits ». Elle est prof de sciences économiques et sociales dans un lycée de Stains (Seine-Saint-Denis) et syndiquée chez SUD Éducation. Lui enseigne à l’École normale supérieure de Cachan (Val-de-Marne) et s’est promis d’adhérer « d’ici ce soir » au Snesup-FSU, l’aboutissement d’une réflexion de plusieurs mois. Au premier tour, ils ont tous les deux voté pour Jean-Luc Mélenchon. Antoine se résigne à voter Macron au second, même si « dans le mouvement social, on le déteste, il nous a gazés l’an dernier ». Camille n’ira pas voter du tout. « Dans mon milieu – des profs et des militants d’extrême gauche –, on sera extrêmement nombreux à s’abstenir. Macron, de toute façon, fait le lit du FN ». Au même moment, le candidat tient un meeting à la Villette, dans le nord de Paris.
Cette fois-ci, les centrales syndicales n’ayant pas réussi à se mettre d’accord sur un mot d’ordre commun, les rassemblements du 1er Mai se sont tenus en ordre dispersé, comme chaque année depuis 2012. Trois jours avant le défilé, Éric Beynel, porte-parole de Solidaires, « se pos[ait] des questions sur le degré de mobilisation ».