Emmanuel Macron est-il un nouveau De Gaulle ou une Jeanne d’Arc moderne ? Le macronisme est-il schumpétérien ou saint-simonien ? Quelle est l’influence de la pensée du philosophe Paul Ricœur sur le chef de l’État qui, plus jeune, fut son assistant ? Depuis quelques semaines, le monde intellectuel français s’est lancé dans une quête qui fait écho à cette obsession : rechercher ce qui fait l’originalité de la pensée macroniste. Des colloques se sont tenus (à Sciences-Po ou à la fondation Jean-Jaurès) et des ouvrages sont parus : notamment Le Moment Macron (Seuil, 2017) de l’historien Jean-Noël Jeanneney et Macron, un président philosophe (Éditions de l’Observatoire) du journaliste Brice Couturier. On a loupé les colloques, mais on s’est jeté sur les livres (pas tous), avec l’espoir un peu fou qu’on allait pouvoir avancer dans notre enquête. Une fois n’est pas coutume, ceci est donc une critique de livres.

Première constatation, chaque auteur aborde Macron avec ses « armes » intellectuelles. Historien – à la retraite – et animateur de Concordance des temps, émission sur France Culture où, chaque samedi matin, un spécialiste d’une période historique est invité à mettre en perspective l’actualité avec des épisodes passés, Jeanneney reproduit ce dispositif. Il va chercher dans le passé politique de la France de quoi éclairer la démarche macroniste. Exemple, la rapide accession au pouvoir du leader d’En marche ressemblerait au coup d’État du Premier consul Bonaparte qui, en 1799, « introduisit à bride abattue des réformes destinées à pérenniser et à compléter les intuitions des assemblées révolutionnaires » et le « fit avec une promptitude, une détermination et une efficacité qui assurèrent à plusieurs de ses décisions une solidité qui en a pérennisé le résultat jusqu’à nos jours ». Cette élection surprise pourrait aussi être comparée au retour au pouvoir de De Gaulle en 1958, alors qu’un an auparavant « les sondages disaient que seulement 5 % des Français imaginaient que l’ancien chef de la France libre, reclus à Colombey-les-Deux-Eglises, pourrait jouer un rôle à l’avenir ».
Avec cette méthode, Jeanneney tente de construire une filiation intellectuelle à un homme qui s’est dit « et de gauche et de droite » et se revendique « progressiste », bataillant contre les « conservateurs » de tous bords. Son credo,