Le changement est passé inaperçu de beaucoup, mais il est important. Entre les mois de juin et de juillet, la plateforme de streaming musical Deezer, toujours basée à Paris, a éjecté de ses pages les termes « urbain », « musique urbaine » et « pop urbaine ». À la place, elle a créé une série de playlists labellisées « black culture » : Black icons of soul, Black icons of pop, Black icons of jazz (et of rock, of R’nB…). En France, la playlist Pop urbaine est devenue En mode R’nB. Le terme « urbain » est « dépassé et n’aide pas à faire avancer le débat », m’a dit Junior Foster, le responsable de la relation avec les artistes chez Deezer, qui a supervisé cette mutation avec les équipes dispersées à travers le monde. « Depuis longtemps, [ce terme] a été utilisé pour rassembler les artistes noirs sous la même étiquette, quel que soit le genre de musique qu’ils font. Il a aussi été utilisé pour vendre des artistes noirs au grand public sans utiliser le terme “noir”. »
Voilà une conséquence très concrète du vaste débat qui s’est ouvert au sein de l’industrie de la musique dans la foulée du mouvement Black Lives Matter, lorsque des salariées racisées de maisons de disques se sont mobilisées pour rappeler que cette industrie aux dirigeants très blancs (et très mâles) s’est largement construite en vendant des musiques jouées par des artistes noirs (lire l’épisode 1, « Racisme dans la musique : la révolte branche le son »).