Avertissement aux lectrices et aux lecteurs : cet épisode contient des scènes violentes.
Mars 2013, Nanterre, Hauts-de-Seine. Dans les bureaux de la direction centrale de la police judiciaire, Chantal Zarlowski, commandante et responsable du groupe central des mineurs victimes, décroche son téléphone. À l’autre bout du fil, l’attaché de sécurité de l’ambassade de France au Viêtnam lui parle d’un ressortissant français soupçonné d’avoir abusé de mineurs. Un certain Olivier Larroque, gastro-entérologue, né en 1962 et exerçant à l’hôpital français de Hanoï. Le signalement provient d’une ONG, Blue Dragon. Un peu plus d’un mois plus tard, celle-ci transmet aux enquêteurs français une carte mémoire d’appareil photo subtilisée au suspect par l’une de ses victimes présumées. À l’intérieur, 546 photos et 69 vidéos, la majorité mettant en scène l’agression sexuelle de jeunes garçons (lire l’épisode 1, « Olivier Larroque, la dernière cavale d’un pédocriminel »). Il n’en faut pas tant pour ouvrir une enquête préliminaire. À Nanterre, le travail commence.
Fondé en 2006 au sein de l’Office central pour la répression de la violence aux personnes (OCRVP), le groupe central des mineurs victimes rassemble dix-huit enquêteurs spécialisés. Sous l’égide du parquet des mineurs de Paris, les policiers et leurs trois collègues gendarmes plongent dans les horreurs des violences sexuelles infligées aux enfants, explorent et surveillent les lieux de rencontre virtuels des pédocriminels dans les tréfonds du dark web et brassent chaque jour des milliers d’images et de vidéos dont le sordide dépasse l’imagination. « Il y a encore quelques années, il n’y avait que huit enquêteurs, précise Franck Dannerolle, chef de l’OCRVP. Et si un effort a été consenti depuis, cela reste encore insuffisant face aux enjeux. » « Pour vous donner une idée, on reçoit environ 300 signalements par jour et plus de 500 enquêtes sont ouvertes chaque année », enchaîne Chantal Zarlowski.
La commandante de police a la parole grave et précise. Au sein du groupe central des mineurs victimes, elle explore les méandres de cette violence intime depuis si longtemps qu’elle en connaît par cœur les rives tortueuses. Et elle a pu en observer l’évolution. « 95 % des enquêtes ouvertes concernent de la pédocriminalité en ligne, c’est-à-dire des images