Ce mardi après-midi, la cour d’appel de Paris doit rendre son jugement dans l’affaire Cahuzac. On saura alors si l’ancien ministre du Budget, condamné en 2016 à trois ans de prison ferme et cinq ans d’inéligibilité pour fraude fiscale et blanchiment, voit sa peine confirmée, allégée ou alourdie. Et, en conséquence, s’il doit être incarcéré. C’est tout l’enjeu de ce second procès, comme l’a souligné Jérôme Cahuzac lui-même à l’audience : même s’il reconnaît sa culpabilité, il a fait appel pour éviter la prison. L’ancien ministre en a « peur », au point que son avocat, Éric Dupont-Moretti, a « suppli[é] » la cour de lui épargner (lire l’épisode 26, « Au procès Cahuzac, face-à-face sur la fermeté de la peine »).
Si Jérôme Cahuzac devait aller en prison malgré tout, il serait l’exception plutôt que la règle, surtout pour une personnalité politique. Cela fait vingt ans qu’aucun ancien ministre n’a été envoyé derrière les barreaux pour une affaire de probité. La short list est d’ailleurs si « short » qu’un paragraphe suffit. Numéro 1 : Alain Carignon, ancien ministre de la Communication du gouvernement Balladur. Il a passé vingt-neuf mois en prison entre 1996 et 1998, pour corruption, abus de biens sociaux et subornation de témoins. Numéro 2 : Jacques Médecin, ex-secrétaire d’État au Tourisme dans le gouvernement Barre, condamné pour détournement de fonds et abus de confiance. Il a été incarcéré de 1993 à 1995, d’abord en Uruguay (où il était parti… pour échapper à la prison) puis en France. Numéro 3 : Bernard Tapie, éphémère ministre de la Ville du gouvernement Bérégovoy. Il a passé six mois en prison en 1997 pour corruption et subornation de témoin. Numéro 4 : Jean-Michel Boucheron, encore plus éphémère secrétaire d’État aux Collectivités territoriales du gouvernement Rocard. Condamné en 1997 pour complicité de faux en écriture et complicité d’usage, il a été placé en détention pendant un an, puis en semi-liberté.

Ex-ministre ou pas, le passage par la prison est rare dans les affaires de fraude fiscale. Devant la mission parlementaire sur le verrou de Bercy en janvier, Rémy Heitz, directeur des affaires criminelles et des grâces, a fourni quelques chiffres (lire l’épisode 20, « Le verrou de Bercy fait grincer le Parquet national financier »). Il reconnaît que le nombre de condamnations pour fraude fiscale en France « est relativement faible » et est en baisse : 524 en 2016, contre 683 l’année précédente.