À Plestan (Côtes-d’Armor)
C’est un petit ruisseau dont les eaux sont grises et l’écume blanchâtre. On l’a arpenté mi-juin sur plus d’un kilomètre à Plestan, dans les Côtes-d’Armor, à côté de Lamballe-Armor. Plus on avançait, plus il sentait les canalisations. C’est Bernard Calfort, président de l’Association agréée pour la pêche et la protection des milieux aquatiques (AAPPMA) du village voisin de Plénée-Jugon, qui a alerté sur le désastre au début du mois. Sur place, il décrit : « C’était encore pire quand je suis venu la première fois. L’odeur était insupportable et l’eau encore totalement trouble. » Au bout du chemin, une ferme géante : plusieurs hangars, des grands silos, des tas recouverts de bâches, des éoliennes et un méthaniseur, soit une immense cuve surmontée d’un dôme où est produit du « biogaz » par fermentation de matières organiques. Une technologie en plein boom, en Bretagne comme ailleurs. D’après les informations et les témoignages que nous avons pu recueillir, l’origine de la pollution se trouve ici.
Mais d’abord, un peu de contexte. Dans les environs de Lamballe-Armor, une ferme pareille ne détonne pas. La commune vit grâce à l’agroalimentaire, c’est la capitale du cochon. Entre le centre-ville et la nationale 12, l’abattoir porcin de la Cooperl est le plus grand de France : 50 000 bêtes y sont tuées chaque semaine. Pour l’alimenter, il faut élever du porc en masse. Guillaume Moser, président de l’AAPPMA de Lamballe, a fait les comptes : sur trente communes des alentours, on trouve plus de 2 200 sites agricoles. Beaucoup ressemblent plus à de petites usines qu’à de grandes fermes. Les animaux y vivent pour l’immense majorité sans lumière naturelle, avec en général 0,65 mètre carré disponible par adulte. Les porcs évoluent sur des caillebotis métalliques, ce qui peut blesser leurs pattes mais facilite la collecte de leur lisier. Cet univers rend les bêtes

À l’échelle de la région, on trouve environ 6 000 élevages de porcs. Problème : ils sont de plus en plus salissants. Brieuc Le Roch, juriste de l’association Eau et rivières de Bretagne, nous avait alerté en février dernier à ce sujet :