Il faut revoir les images. Des boules de feu dans la nuit, une longue traînée de fumées noires qui navigue pendant toute une journée de Rouen jusqu’aux Pays-Bas. Ce 26 septembre 2019, des milliers de tonnes de produits chimiques ont brûlé dans l’usine Lubrizol, productrice d’additifs de lubrifiants de moteurs. Deux questions s’imposent rapidement chez les personnes exposées. La première : à qui la faute ? Près de deux ans plus tard, Lubrizol tentait d’échapper à la justice, mais, ce mercredi 30 juin, la cour d’appel de Paris a rejeté la requête de l’entreprise en nullité de l’enquête. Lubrizol reste donc mise en examen [article mis à jour après la décision de justice]. La seconde : qu’ont véritablement respiré les victimes ? Aujourd’hui, elles ne le savent pas toujours pas. Et encore moins ce que leur corps en a gardé. Esseulées, elles doivent faire pratiquer elles-mêmes les prélèvements et analyses qu’elles jugent indispensables, mener elles-mêmes les démarches nécessaires. Nous avons contacté une quinzaine de personnes impliquées dans cette catastrophe à l’époque et consulté des dizaines de documents. De quoi raconter cet événement, des prémices du drame annoncé jusqu’à ses lendemains, à savoir l’absence de sanctions des responsables comme la prise en charge défaillante des victimes.
21 janvier 2013. Du mercaptan s’échappe de l’usine Lubrizol. C’est au moins la troisième fois depuis 1975.