«Elle suscite l’ironie dans ses propres rangs », elle « ne s’impose pas », sa proposition de baisser la vitesse sur autoroute à 110 km/h est un « flop », « mais quelqu’un la conseille ? »… En cet automne 2021, c’est tous les jours la fête à Anne Hidalgo dans les médias. Et ce, avant même son idée de primaire sèchement rejetée par la plupart des autres candidats de gauche (lire l’épisode 1, « Hidalgo en Anne sèche ») et avant que Christiane Taubira entre dans la danse. On la surnomme alors « Madame 4 % », on se demande s’il faut la « débrancher » et ses soutiens politiques se permettent de lui faire la leçon sur la meilleure manière de faire campagne – « Si j’ai un conseil à lui donner, c’est de faire un programme », a ainsi déclaré François Hollande, quelques semaines après avoir animé un meeting commun en Corrèze. Face à un tel climat, beaucoup auraient déjà renoncé. Pas Anne Hidalgo. Elle a l’habitude qu’on se moque d’elle ou qu’on la sous-estime. Et, par prudence, on se gardera bien de l’enterrer. Car l’histoire de la candidate socialiste le montre : dans sa vie personnelle comme dans sa carrière politique, elle a rencontré de nombreux obstacles, et elle les a à chaque fois surmontés.
Dès son enfance, la petite Ana María (elle ne prendra le nom d’Anne qu’à l’adolescence) doit faire ses preuves plus que ses petits camarades. Cette fille d’immigrés espagnols – son père était ouvrier et sa mère couturière – raconte ainsi avoir subi à Lyon l’hostilité d’une de ses institutrices qui, pour motiver les autres élèves, disait d’elle et de sa sœur María : « Ce ne sont pas les petites Espagnoles qui vont être les premières de la classe. » Devenue inspectrice du travail, elle s’est retrouvée confrontée à un monde masculin misogyne et a dû batailler pour remplir sa tâche. Au journaliste Serge Raffy, elle raconte ainsi avoir « eu les pires difficultés à accéder aux zones de forage » des mineurs parce qu’elle était une femme. Cela ne l’a pas empêchée de faire une belle carrière dans l’administration, jusqu’à devenir directrice de l’Institut national du travail, de l’emploi et de la formation professionnelle. Une fois entrée en politique et nommée en 2001 première adjointe du maire de Paris Bertrand Delanoë, elle est prise pour une potiche et subit les moqueries des barons socialistes de la capitale à propos du nom de sa délégation : le « bureau des temps », chargé de concilier vies professionnelle et personnelle. Soi-disant