Elle se présente, éreintée, au pupitre de la scène de la Grande halle d’Auvergne, en périphérie de Clermont-Ferrand (Puy-de-Dôme). Ce vendredi matin 31 mars 2023, peu après 11 heures, Sophie Binet s’exprime pour la première fois en tant que secrétaire générale de la Confédération générale du travail (CGT), à l’issue d’un congrès « difficile, compliqué et parfois violent ». En face d’elle, des centaines de militants de la centrale de Montreuil, ville de Seine-Saint-Denis où est installé son siège depuis 1983. Certains applaudissent, d’autres non. La majorité affiche des visages aux traits tirés, les yeux rouges de fatigue. Mais tous sont soulagés. « Je vais vous demander toute votre indulgence, étant donné que ça fait 48 heures que je n’ai pas dormi, et que ces conclusions ont été écrites en une heure. Donc ne vous attendez pas… Ça va être rapide », lance-t-elle. Après des heures de tractations fiévreuses, le syndicat referme son 53e congrès avec une femme à sa tête, pour la première fois de son histoire.
Le dénouement s’est joué quelques heures plus tôt, aux aurores. « Notre bureau exécutif aurait dû être élu jeudi soir, mais il y avait des divergences d’avis, des questions politiques qu’il fallait prendre le temps d’arbitrer. L’ambiance était relativement tendue, euphémise Nathalie Bazire, secrétaire générale de l’Union départementale de la Manche et élue secrétaire confédérale. Quand on dort deux heures en trois jours, c’est sûr que les discussions deviennent difficiles. »
Juste le temps d’avaler un dîner de 20 h 30 à 21 h 45, et les membres du comité confédéral national se remettent au travail jusqu’à 7 heures le lendemain.