Le jury a mis dix heures à rendre son verdict. On n’aurait pas aimé être à sa place, à devoir établir la « vérité judiciaire » sur la mort de Clément Méric et trancher le sort de ces trois accusés (lire l’épisode 1, « Clément Méric, un procès politique »). Il en fallait du temps, pour démêler les témoignages, les expertises, les plaidoiries, en tirer les preuves et se forger l’« intime conviction » exigée. Aux alentours de 19 h 30 ce vendredi, les abords de la salle d’audience ressemblent à un métro bondé. Les journalistes, la famille d’Esteban Morillo, celle de Clément Méric et ses soutiens patientent, pressés les uns contre les autres. Cette proximité imposée permet de se mettre quelques secondes à la place de chacun. À l’intérieur depuis le matin, gardés par des gendarmes, les accusés attendent de connaître leur destin avec leurs avocats pour seuls visiteurs autorisés. La foule s’anime quand les portes s’ouvrent pour la laisser entrer. Esteban Morillo, sans doute déjà conscient qu’il ne dormira pas chez lui ce soir, profite des derniers instants avec ses proches.
Quand la cour fait son entrée, les jurés ont l’air fatigué et grave. Pendant toute la durée du procès, assis de part et d’autre de la présidente Xavière Siméoni et de ses deux assesseurs, ils ont collé à leur serment de rester attentifs aux débats sans manifester aucune opinion. Il était temps de livrer celle qu’ils ont élaborée ensemble.