Le fondateur d’une entreprise viré sans ménagement par ses administrateurs, rappelé quelques années plus tard pour sauver l’entreprise de la faillite et qui fait d’elle le numéro un mondial… Dans la Silicon Valley, ce scénario à la Apple, quand Steve Jobs était revenu pour faire entrer l’entreprise dans le XXIe siècle, est dans toutes les têtes lorsque Jack Dorsey redevient PDG de Twitter en octobre 2015 (lire l’épisode 1, « Twitter, réseau et ressentiments »). Le cofondateur de la marque à l’oiseau bleu sera-t-il à la hauteur ? La feuille de route de Dorsey est alors limpide : relancer la croissance du réseau social, gagner de l’argent et faire de Twitter un géant de la tech, à l’image de Facebook ou Google. Disons-le tout de suite : vu de 2022, le bilan paraît très mitigé. Certes, Twitter a regagné des abonnés et fait des bénéfices en 2018 et 2019. Mais cette embellie n’a été que passagère, conduisant les actionnaires à demander et obtenir, à nouveau, le départ (définitif ?) de Jack Dorsey.
Si, en octobre 2015, la comparaison entre Jack Dorsey et Steve Jobs a tant fait parler, c’est que les deux hommes ont une trajectoire similaire. Au moment de leur éviction, l’un et l’autre étaient accusés d’être un peu dingues et d’avoir un management erratique, un trait de caractère qu’on a rapidement oublié grâce à leur succès ultérieur dans les affaires. En 1997, quand il revient chez Apple après en avoir été viré en 1984, Jobs a fait fortune grâce à Pixar ; en 2015, Dorsey est lui devenu milliardaire grâce à Square, une entreprise de solution de paiement sur mobile qu’il a fondée en 2010. Tous les deux ont adopté un look qui les identifie au premier coup d’œil : pull noir pour l’un, barbe fournie pour l’autre. Et cette ressemblance est plus qu’assumée : Dorsey utilise les mêmes références culturelles que Jobs (le mahatma Gandhi, les Beatles…) et plagie même des extraits de discours ou des expressions du fondateur d’Apple. Comme le fait de se déclarer « éditeur » de Square ou de Twitter, pas simplement son dirigeant.
Le cofondateur de Twitter travaille aussi sa figure de nouveau gourou de la Silicon Valley en faisant savoir, en août 2014, qu’il participe aux manifestations de Ferguson contre les violences policières racistes. Qu’il est fan de la station française FIP