Pour son premier jour de grève contre la réforme ferroviaire, Jean-François Denoyelle a sauté mardi dans le train de 13 h 38 pour rejoindre Paris depuis la gare de Vaires-sur-Marne, à l’est de la capitale, près de la cité cheminote où résident plusieurs centaines d’agents SNCF (lire l’épisode 1, « Derrière la grève, leurs vies sur les rails »). Fortement ralenti, le trafic assurait quand même un train par heure, assez pour permettre à ce formateur d’arriver dans les temps à la manifestation au départ de gare de l’Est. Une heure plus tard, le voilà sur le parvis au milieu des militants de SUD Rail, son syndicat, et de leurs drapeaux vert fluo agités dans les airs. Jean-François Denoyelle fait sensation avec sa casquette de capitaine de croisière, piquée de pin’s militants, qu’il arborait déjà le 22 mars, jour de grève de la fonction publique à laquelle les cheminots se sont joints. Une sorte de répétition générale avant la course de fond débutée mardi, qui pourrait durer trois mois.
Les cheminots sont un pare-feu. Si l’on a encore des protections, c’est que l’on a toujours réussi à les défendre jusque-là, et que les autres métiers en ont perdu au fil des années. Si on perd aussi, c’est fini pour tout le monde.
Dans l’air rosi par les fumigènes, cet ancien agent de manœuvre et aiguilleur répète son hostilité au projet du gouvernement. « Les chemins de fer doivent absolument rester un service public et desservir tout le territoire », insiste-t-il. Denoyelle craint que la transformation de la SNCF en une société anonyme (SA) plutôt qu’un établissement public à caractère industriel et commercial (Epic), couplée à l’ouverture à la concurrence, produise tout l’inverse.