Sur son bureau, trônent les 370 pages du rapport du groupe Les Républicains sur « La transidentification des mineurs », remis la semaine dernière au Sénat. « Il est beau, il est bien présenté, c’est un beau document », lâche la sénatrice Jacqueline Eustache-Brinio en le brandissant fièrement, telle une bible. À un détail près : le message transmis n’est pas « aimez-vous les uns les autres » mais « interdisons les transitions aux mineur·e·s trans ».
Depuis juin 2023, la sénatrice du Val-d’Oise reçoit des parents de personnes trans, des collectifs antitrans comme Ypomoni, des docteurs et quelques associations concernées. « J’ai passé six mois à interroger 67 experts français mais aussi étrangers pour pouvoir faire ce rapport », explique-t-elle aux Jours, sans le lâcher des yeux. Forte de cette somme, la sénatrice entend ainsi positionner son groupe contre les transitions des mineur·e·s trans, tout en dénonçant
La sénatrice a déjà été remarquée pour avoir voté contre la constitutionnalisation de l’IVG, contre l’ouverture de la PMA aux femmes seules ou en couple lesbien et contre la fin des thérapies de conversion pour les personnes trans. Bien sûr, si Jacqueline Eustache-Brinio s’en prend aux mineur·e·s trans (lire l’épisode 8, « “Mes parents ont compris qu’être trans n’était ni rare ni grave” »), c’est au nom de la « protection de l’enfance », justifie-t-elle. « Quand on arrive sur Terre, sincèrement, on est homme ou femme, point barre, on arrête. Après, on a la vie sexuelle qu’on veut, on s’en fout. Vivre avec un homme, vivre avec une femme. Moi, sur ces sujets, je suis quelqu’un de très ouvert, mais la vie de chacun regarde chacun. »
Parmi les préconisations de son rapport, la sénatrice souhaite donc interdire aux mineur·e·s trans d’avoir recours à des bloqueurs de puberté, à des opérations, à des hormones ou à une transition sociale, notamment à l’école (interdiction d’utiliser le prénom d’usage ou le bon pronom). Une interdiction qui, précisément, va à l’encontre de la protection de l’enfance, rappellent nombre d’associations et les médecins qui s’occupent de mineur·e·s trans. Aujourd’hui, le recours aux bloqueurs de puberté est possible uniquement à partir de la puberté et ne concerne qu’une minorité d’enfants trans :