«La guerre contre le terrorisme sera longue et nous savons que c’est sur le terrain qu’elle se gagnera», démarre le rapporteur pour avis Sébastien Pietrasanta (PS, Hauts-de-Seine), sur un ton solennel. Et de nos jours, pourrait-on ajouter, les terroristes ne fraudent-ils pas le métro ? Face à une commission des Lois plutôt détendue en cette matinée du 8 décembre, le président Jean-Jacques Urvoas se frotte le visage pour finir de se réveiller et distribue calmement la parole.
Gilles Savary le reconnaît, sa proposition de loi a connu un parcours un peu chaotique
. Bel euphémisme. Au printemps dernier, le député socialiste de la Gironde commence tranquillement à travailler sur la fraude dans les transports en commun, qui menace avant tout l’économie de la SNCF et de la RATP. Mais en août, son texte se retrouve une première fois percuté par l’attentat manqué dans le Thalys
, et quelques semaines plus tard par les attentats du 13 Novembre. La proposition de loi est entièrement réécrite avec le terrorisme en toile de fond. Le gouvernement, qui a engagé la procédure accélérée en octobre, espère la voir entrer en vigueur début mars 2016. En plein état d’urgence, la commission des Lois puis celle du Développement durable de l’Assemblée nationale l’ont examinée mardi 8 décembre.
Je ne voulais pas que les Français pensent qu’on est en train de leur faire les poches sur un tas de cadavres.
Le texte associe tout un tas de questions ayant le rail pour seul point commun : insécurité et sentiment d’insécurité
paraît-il croissants dans les transports incivilités
et harcèlement sexuel ; risque terroriste… et fraude, donc. Cette dernière préoccupation demeure partie intégrante du texte malgré les observations de certains collègues
de Gilles Savary. Lui-même a hésité, par crainte de l’inconvenance
juste après des attentats meurtriers. Il est plus direct sur cette question passé 22 heures, en commission du Développement durable : Je ne voulais pas que les Français pensent qu’on est en train de leur faire les poches sur un tas de cadavres.
Mais après tout, encaisser plus efficacement les amendes (14% le sont aujourd’hui) permettrait de mieux financer la sûreté
, dit-il, donc tout se tient.
Telle qu’elle est aujourd’hui écrite, la loi étendrait les prérogatives des services de sécurité de la RATP et de la SNCF (le GPSR et la Suge). Dès lors autorisés à palper
un voyageur et à fouiller ses bagages, les agents pourraient aussi lui interdire l’accès au train
, le contraindre à descendre d’une rame
voire à quitter la gare
s’il ne coopère pas.