Depuis un mois, le contraste est saisissant entre les deux principaux battus de la présidentielle. D’un côté, Jean-Luc Mélenchon, omniprésent dans les médias, proclame son ambition d’être « élu » Premier ministre après avoir réussi à unir les principaux partis de gauche (lire l’épisode 1, « À gauche : salade, tomate, union »). De l’autre, Marine Le Pen fait le service minimum : elle assure que le Rassemblement national (RN) ne remportera pas les élections législatives et, pour être sûre d’avoir raison, exclut toute alliance avec Reconquête. Ce début de campagne en sourdine rappelle ce que la candidate d’extrême droite a pratiqué durant la présidentielle : l’art de se faire oublier, laissant Éric Zemmour attirer les lumières des médias par ses excès. Une stratégie de « dédiabolisation » qui risque cependant de ne pas servir à grand-chose si son électorat ne se déplace pas les 12 et 19 juin prochains.
Exemplaire de cette drôle de campagne, l’agenda de Marine Le Pen depuis quatre semaines. Il est vraiment très, mais alors, très très léger. Après le second tour, la candidate défaite a officiellement pris « du recul ». Pendant quinze jours, on ne l’a pas vue du tout. Même le 1er mai, elle n’est pas sortie déposer une gerbe devant la statue à Paris de Jeanne d’Arc, ce qu’elle avait l’habitude de faire chaque année, comme son père avant elle. Elle s’est contentée d’une déclaration filmée rendant « hommage au travail et aux travailleurs ». Selon ses proches, elle avait besoin de « prendre du repos » après une « campagne très fatigante ». « Ne lancez pas d’avis de recherche ! », a ainsi ironisé Philippe Ballard, conseiller régional RN d’Île-de-France, pour désamorcer la critique.
On ne sait pas où Marine Le Pen s’est rendue pour prendre « du recul », ni si elle a pris ses chats avec elle (si vous ne le saviez pas, la candidate a passé pendant le confinement un diplôme d’éleveuse professionnelle de matous et en possède au moins six, qu’elle affiche sur un compte Instagram dédié… mais privé). Ce qui est certain en revanche, c’est qu’elle est revenue de sa courte retraite en décidant de faire la modeste. Alors qu’elle a obtenu 13 millions de voix au second tour de la présidentielle, elle n’envisage ainsi comme avenir politique personnel que de reconquérir son siège de députée, dans la 11e circonscription du Pas-de-Calais.