C’est au deuxième étage du Fashion Center d’Aubervilliers, en Seine-Saint-Denis, autoproclamé « plus grand centre de vente en gros d’Europe », qu’Uber a ouvert à l’automne un local pour accueillir ses chauffeurs. Perdue au fond d’une allée où des grossistes chinois poussent des diables encombrés de cartons, quelque part entre « Giulia showroom lingerie » et « Chic et jeune prêt-à-porter », la discrète entrée grise détonne. Le Fashion Center a deux atouts aux yeux d’Uber : son emplacement – aux portes de la périphérie nord-est, son terrain de chasse favori pour le recrutement de chauffeurs (lire l’épisode 1, « En banlieue, Uber monte dans les tours ») – et son parking. Jusqu’à cet été, les chauffeurs étaient reçus au siège du groupe, dans le quartier du Pont-de-Flandres, dans le XIXe arrondissement de Paris. Mais le ballet de leurs voitures noires a fini par importuner le gestionnaire de cette zone de bureaux.
Une demi-heure avant l’ouverture, cinq chauffeurs piétinent déjà devant la porte close. « À 10 heures, la queue peut aller jusque là-bas », pointe l’un d’eux, en désignant l’autre bout de la passerelle, à une trentaine de mètres. Une demi-heure plus tard, ils sont dix fois plus nombreux à patienter dans l’espace d’accueil. Street-art aux murs, poufs et canapés, café et croissants à volonté font souffler sur la salle un petit vent de Palo Alto. Uber emploie dans ce centre environ quarante salariés et intérimaires. La plupart ne doivent pas dépasser la trentaine.