Disney ramène enfin les mutants au bercail

Corentin : Bonjour Geoffroy, aujourd’hui au programme, Disney, des mutants, des dollars et des super-pouvoirs. Gros programme en somme.

Geoffroy : Hé oui ! Tu n’es pas sans savoir, mon cher Corentin, que le 14 décembre dernier, Disney a racheté une grande partie de la 21st Century Fox pour un montant de 52,4 milliards de dollars. Un montant plus de 10 fois supérieur à celui de Marvel ou de Lucasfilm.

C : D’accord mais concrètement ça veut dire quoi ?

G : Ça veut dire plein de choses, à condition bien sûr que les autorités fédérales n’y voient aucun souci. Ça veut dire d’abord que Disney n’a plus que quatre gros studios concurrents : Sony, Universal, Paramount et surtout, Warner. Ça veut dire aussi que Netflix a de quoi avoir peur. On savait déjà que Disney allait supprimer ses films du catalogue de vidéo à la demande afin de lancer sa propre plateforme. Ça fera autant d’œuvres qui seront exclusives au service de Disney.

C : Ah oui, cette suite de décision a du sens maintenant qu’on a connaissance de ce rachat...

Et ça veut surtout dire que les créations maison de la Fox, comme les Simpsons, Avatar, Alien, Die Hard ou La Planète des Singes passent dans l’escarcelle de Disney. Et, c’est ce qui m’intéresse tout particulièrement, que les X-Men pourront enfin rejoindre les Avengers au cinéma !

C : Pourquoi, ça n’était pas possible avant ?

G : On ne connaît pas bien les comics c’est ça ? [eh non… (en vrai si ça va)] Un petit rappel alors. Aux États-Unis, il y a deux grandes maisons d’édition de super-héros. DC Comics, qui édite Batman, Superman ou Wonder Woman, et Marvel, qui possède les droits de Spider-Man, des Avengers ou des X-Men. La première, DC, appartient à Warner. Jusque-là, c’est donc logique que Warner produise et distribue les films de super-héros comme Justice League ou Man of Steel.

En revanche, chez Marvel, c’est un bordel monstre depuis la fin des années 90. Avant la création de Marvel Studios et le rachat par Disney en 2009, l’éditeur ne faisait pas de films. Il revendait donc les droits d’adaptations à d’autres studios : Sony Pictures pour Spider-Man, et la 20th Century Fox pour les X-Men et les Quatre Fantastiques. Sauf que depuis, Marvel a lancé son propre studio de cinéma et a dû créer son univers avec des seconds couteaux, les Avengers, bien moins populaires que les X-Men et Spider-Man à l’origine.

C : Et Marvel n’a jamais pu racheter les droits des X-Men ?

G : Non, jamais. En fait, la licence X-Men a été tellement juteuse pour la Fox que le studio a su proposer un film tous les trois ans, du moins au début. Maintenant, ils sont même à trois films par an. L’an prochain on aura donc droit aux Nouveaux Mutants, à Deadpool 2 et à Dark Phoenix, tous trois tirés des X-Men.

[Insert Nouveaux Mutants]

Pour que Marvel récupère les droits, il aurait fallu que la Fox abandonne la franchise, comme ils l’ont fait avec Daredevil. Autant te dire qu’avec 783 millions de dollars au box-office mondial pour Deadpool, ou 617 pour Logan, ce n’était pas prêt d’arriver. Du coup, Disney est allé au plus simple : racheter directement la 20th Century Fox, et toutes ses licences.

C : Mais pourtant Spider-Man a bien rejoint les Avengers sans que Disney ne rachète Sony…

G : Là c’est un cas un peu spécial. Les films Spider-Man ne marchaient plus au cinéma après les échecs de Amazing Spider-Man 1 et 2 avec Andrew Garfield. Sony, voyant que ça allait capoter, a donc conclu un accord avec Marvel en se disant que le personnage serait plus rentable en intégrant l’univers des Avengers. Du coup Sony continue à produire les films Spider-Man, mais Marvel peut désormais intégrer le personnage aux histoires des Avengers. C’est pour ça qu’on a pu le voir dans Civil War ou qu’Iron Man était présent dans Spider-Man Homecoming.

[Insert Spider-Man]

C : C’est compliqué tout ça !

G : C’est très simple pourtant : un max de super-héros dans un même film. C’est tout le principe des cross-overs et des événements annuels dans les comics qui pourront être adaptés au cinéma, un peu à l’instar de Civil War justement, ou des films Avengers.

Avec le rachat de la Fox, non seulement Disney pourra continuer à proposer des films X-Men classiques, comme on les connaît jusqu’à présent, mais pourra également reprendre Wolverine, le professeur Xavier et Magneto, et les confronter à Iron Man, Captain America ou Spider-Man.

C’est une recette qui vient à la base des comics. Au début des années 2000, alors que les éditeurs commençaient à perdre pied, ils ont imaginé des événements annuels. Toutes les séries étaient mélangées pendant un ou deux mois et les personnages pouvaient se croiser d’un comic book à l’autre, s’allier ou s’affronter dans le but de protéger le monde. Parfois même, les événements étaient tellement importants dans le monde des comics qu’il rebattait complètement les cartes. De quoi permettre ainsi aux éditeurs de relancer artificiellement leurs séries de comics avec des numéros 1 et dire aux lecteurs néophytes : « c’est votre moment, allez-y, vous pouvez enfin vous y plonger, on a fait table rase du passé et vous ne serez pas perdus ».

C : D’accord, un moyen de redonner un dynamique globale à ses séries, quoi. C’est pareil pour le cinéma ?

G : Sur grand écran, ça fera évidemment davantage de spectacles, plus de super-héros à l’écran, un véritable monde de super-héros et non pas une bande de dix personnages en lycra qui s’affrontent sur une piste d’aéroport comme dans Civil War.

Et surtout, ça présente un véritable intérêt commercial pour Disney. Toutes les histoires devraient désormais faire part du même univers. Aujourd’hui, tu peux certes aller voir Thor Ragnarok et Dr. Strange sans avoir vu Civil War, mais les spectateurs qui veulent comprendre toutes les manigances de Thanos, le méchant du futur Avengers Infinity War, iront voir tous les Marvel.

Avec les X-Men en plus, ça fait davantage de films à aller voir pour les spectateurs des films Marvel, davantage d’intrigues liées les unes aux autres et surtout l’occasion d’enfin savoir qui est le plus fort entre Hulk et Wolverine. Du moins au cinéma.

C : Oui ! Mais bon... Tout ça ne nous dira pas qui est le plus fort entre l’hippopotame et l’éléphant, hein ? Merci beaucoup Geoffroy ! Et à la prochaine.