Benjamin : Chers tous, je vous emmène dans un monde plein de poésie, de soleil, de routes qui montent et de lavande. Et surtout, dans un équilibre un peu précaire, mais qui, aujourd’hui, va marcher. Bonjour Corentin, aujourd’hui je vais te parler de la France des campagne d’autrefois.
Corentin : (Chante très faux) VOIS SUR TON CHEMIiinnN…
B : Ne refais jamais s’il te plaît. C’est une référence maudite. Non, là on va vous parler d’un film français avec une véritable licence poétique et qui réussit une adaptation. Pas un projet qui sent le placard moisi, pas de nostalgie déplacée, juste du bon métrage. Alors sortez votre béret et votre accordéon, je vous emmène dans l’univers de Sempé.
C : De son vrai nom Jean-Jacques Sempé, 86 ans en 2019, connu en France et à l’international pour la série de livres Le Petit Nicolas.
B : Des aventures simples et parfaites pour apprendre à lire ou pour commencer à lire, notoirement illustrées par Goscinny. Et des livres adaptés au cinéma par Laurent Tirard, dans deux films sortis en 2009 et 2014. Des films que Sempé n’aime publiquement pas, et je le comprends parce qu’ils sont assez plats et ont tendance à oublier le reste de ses acteurs au profit de Kad Merad, qui a nettement plus de présence que le-dit petit Nicolas. Mais ne craignez rien, le réalisateur Pierre Godeau est là pour sauver la mise. Et ce n’est pas quelqu’un de la vieille école : il a 32 ans !
[EXTRAIT BANDE ANNONCE]
B : Raoul Taburin a un secret. C’est le nom d’un des livres de Sempé sorti en 1995, car oui il a fait plein de choses à part le Petit Nicolas. Je vous recommande par exemple Sempé à New York, qui est un très très beau livre. Ici c’est l’adaptation en film d’une histoire charmante. Alors posez-vous, mettez votre peignoir, c’est un pitch qui demande relaxation et cosy.
[FOND SONORE PROVENCAL QUI DÉMARRE. AU MOINS DES OISEAUX QUI FONT CUICUI]
B : Nous sommes dans la ville de Saint-Céron. Il n’y a pas la moindre voiture, que des ruelles en pente, et des petites échoppes qui sont reprises de parents en progéniture. Tant et si bien que tout objet prend automatiquement le nom du spécialiste local. On ne dit plus un vélo, mais un Taburin. Car Raoul Taburin est le seul… et meilleur mécanicien du village. Et Raoul Taburin a une réputation de casse cou du vélo, d’expert du vélo, il est indissociable de sa bécane dans l’imaginaire du village. Et comme le film va nous le montrer chronologiquement, tout ça n’est qu’un gigantesque malentendu.
C : Raoul Taburin n’a jamais tenu plus de deux secondes sur un vélo de ma vie. C’est un imposteur malgré lui !
B : Dès son enfance, il n’a jamais su prendre son envol. Du coup, il a trouvé tous les prétextes pour éviter les balades à vélo, les sorties scolaire, et surtout assister son papa qui est, pas de bol, facteur. Et de fil en aiguille, et après avoir fait un triple looping devant une assistance médusée : la légende de Raoul Taburin, pro du vélo, va se mettre en place sans que personne ne le voit jamais pédaler. Ca c’est le pitch, il est charmant, effectivement on sent bien l’esprit Sempé tout en finesse dedans, et je dis ça sans ironie aucune.
C : Et c’est le casting qui est un peu ironique, puisque le rôle titre est incarné par le délicieux Benoit Poelvoorde.
B : Que tout le monde aime, mais qui était dans Le Vélo de Guislain Lambert. C’est RIGOLO. Il est accompagné d’Edouard Baer, qui joue un photographe parisien de passage avec qui il va entretenir une belle amitié. Ils sont tous les deux parfaits dans leurs rôles respectifs. Et le réalisateur va dérouler une fresque sur quarante ans, où le mensonge originel prend des proportions de plus en plus épiques. Donc toute la substantifique möelle du truc c’est son humour glacé et sophistiqué dans le timing, les détails, les contrechamps. De la poésie ! De la tendresse ! Un bon scénario, rendu par Guillaume Laurant ! Et une acuité de ce que n’importe quel candidat à la présidentielle appellerait « LES VRAIS GENS ».
[EXTRAIT BANDE ANNONCE 2]
Raoul Taburin est littéralement une fable, avec narration, rythme, un peu de réalisme magique et des petits effets spéciaux tout mignons. Et plein de petites trouvailles langagières et sonores. Écoutez bien, chaque bécane fait son propre son. Bref, de la mélancolie et de la poésie plein tubes, ça marche !
C : Alors, est-ce qu’on regonfle ses pneus pour aller voir Raoul Taburin ?
B : J’ai été charmé par Raoul Taburin. Les décors, les acteurs, la poésie qui s’en dégage, c’est un film solide même dans son économie de moyens. On y trouve un art des petits détails, des petits trucs, une simplicité qui donne beaucoup de charme à l’ensemble. C’est un joli métrage rempli de bons sentiments et de soleil, et ÇA MARCHE, car c’est sensible, sensé et bossé. Bien joué. Par contre, soit le point est jamais fait, soit la copie de ma projection avait un problème, soit c’est un film en 3D qui s’ignore parce qu’il est très très souvent flou, c’est très bizarre.
Bon Corentin, je n’en peux plus, je dois me confesser. J’ai un terrible secret. Un fardeau que je ne peux plus porter. De toute façons, personne ne nous écoute là, non ?
C : Tu peux y aller, aucun risque. Les chroniques des Croissants sont tenues du secret professionnel.
B : Je dois l’avouer, je n’ai jamais su… faire de division à deux chiffres.
C : Haaaaan mais attends non en fait (les deux ensemble) ça n’a jamais servi à personne.
« Raoul Taburin a un secret » : la petite reine a trouvé son roi
L’œuvre de Sempé a connu des portages cinématographiques plutôt contestables. Mais avec « Raoul Taburin a un secret », adapté de la bande dessinée « Raoul Taburin », la malédiction semble être levée. Benjamin Benoit nous livre son avis sur ce film qui fleure bon le Sud et la douceur de vivre.
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