C : Aujourd’hui, Morgane Giuliani vient nous parler de Love Addict, premier film réalisé par Frank Bellocq, qui officiait auparavant sur la série Soda, et le programme satirique Groland. Love Addict est en salles depuis le 18 avril. L’humoriste et comédien Kev Adams partage la tête d’affiche avec l’actrice Mélanie Bernier.
M : Salut Corentin ! Le pitch de Love Addict est assez simple et légèrement poussif : Gabriel, incarné par Kev Adams, est un jeune directeur marketing à la carrière florissante. Il se dit “éternel amoureux des femmes”. Bel euphémisme pour signifier qu’en fait, il ne peut s’empêcher de séduire presque toutes les femmes qui croisent sa route, et de coucher avec elles. “C’est plus fort que lui”, comme il dit. Cette obsession commence à lui jouer de sérieux tours dans sa vie professionnelle, et il décide d’en venir à bout. Pour cela, il engage Marie-Zoé, une “mindeuse”, c’est-à-dire, une sorte de coach mentale censée le suivre partout 24h/24 pour l’empêcher de craquer, et l’aider à progresser. Elle est jouée par Mélanie Bernier, donc, que l’on a pu déjà voir dans les comédies Tout là haut et Un peu beaucoup aveuglément.
EXTRAIT 1
M : Gabriel a besoin de Marie-Zoé car il doit rencontrer son possible futur patron, un Américain irascible, et son épouse, réputée extrêmement belle. Il a 3 semaines pour espérer guérir de son addiction, et ne pas mettre en péril son embauche.
C : Dit comme ça, ce pitch fait super peur.
M : Il y a de quoi. Eh bien figure-toi que le film s’en sort pas si mal. Le personnage joué par Kev Adams n’est pas problématique : un grand bravo pour ça. En général, les comédies romantiques qui tournent autour de la notion de séduction présentent les séducteurs comme des bombes attirées uniquement par d’autres bombes. Là, ce n’est pas le cas. Gabriel couche vraiment avec n’importe quelle femme, peu importe son âge, son physique, son origine, son milieu social. Ça rend le postulat de départ plutôt réaliste. Et puis, il n’est pas condescendant ! Pourtant un grand classique chez les personnages masculins des comédies romantiques. Je ne sais pas si tu as vu Hitch, une rom-com qui commence un peu à dater. Will Smith y incarne un coach en séduction qui met tout en oeuvre pour conquérir Eva Mendes, soi-disant la seule femme qui lui ait jamais résisté.
C : On ne retrouve pas ce genre de techniques dans Love Addict ?
M : Le pari du film est de montrer Gabriel comme un “séducteur malgré lui”. Et c’est réussi : son personnage semble sincèrement dépassé par son addiction. Il n’y a pas de drague douteuse ou irrespectueuse. Quand il s’adresse aux femmes, Gabriel les complimente, fait des blagues, essaie de créer rapidement une forme d’intimité, mais il ne les prend jamais de haut, ne les rabaisse pas. Il ne se moque pas non plus d’elles dans leur dos, et globalement, il ne se vante pas de ses “conquêtes”. Pour appuyer le fait qu’il ne considère pas les femmes comme des objets, le film comporte même quelques situations sexistes, auxquelles Gabriel s’oppose à chaque fois.
EXTRAIT 2
C : Qu’en est-il du personnage de Marie-Zoé ?
M : C’est finalement le personnage le plus drôle, parce qu’elle l’est malgré elle. À la base, Marie-Zoé est une psychothérapeute passionnée par son métier, dure avec ses patients, aux méthodes pour le moins… non-conventionnelles. Après avoir été radiée de l’ordre des médecins, elle se retrouve “mindeuse”. Pas le moins du monde sensible à l’humour de Gabriel, elle le trouve plutôt arrogant et le voit comme un pantin sur lequel réaliser des expérimentations. Elle lui pose une ceinture abdominale envoyant des décharges électriques grâce à une télécommande, qu’elle utilise dès qu’il essaie de draguer la première venue. Marie-Zoé prend un malin plaisir à en abuser.
EXTRAIT 3
M : Marc Lavoine - oui oui, le chanteur - joue quant à lui Jo, l’oncle fantasque de Gabriel. Ce dernier l’héberge depuis qu’il s’est fait plaquer par son épouse, dont il attend désespérément le retour. En dandy blessé par la vie, Jo refuse de sortir et tient la gente féminine en horreur, traumatisé par son divorce. C’est vraiment le personnage sur lequel Frank Bellocq, qui signe aussi le scénario, s’est lâché. “Tonton Jo” s’emporte sans arrêt, fait des jeux de mots, des allitérations, des envolées lyriques bien écrites dans l’ensemble. Il se met d’un coup en tête de se prostituer pour gagner de l’argent. Il s’invente un alter ego espagnol, et mélange français et espagnol quand il parle. C’est vraiment absurde mais en tout cas, ça apporte un côté décalé assez rafraîchissant.
EXTRAIT 4
C : Love Addict n’est quand même pas exempt de quelques lourdeurs.
M : Et pas des moindres. Frank Bellocq a inclu au casting d’autres amis à lui : Baptiste Lorber, Gaël Mectoob, du duo Bapt et Gaël, et Jérôme Niel, qui s’est fait connaître avec la chaîne La Ferme Jérôme, puis pour ses tutos déjantés sur Canal Plus. Des comédiens venus de Youtube, qui ont déjà joué dans quelques films, et sont très populaires auprès des moins de 30 ans. Mais là, en terme de caricature, on est vraiment dans l’excès. Ils incarnent 3 startupers revenus de San Francisco, et qui sont des handicapés de l’amour. La simple perspective de parler à des femmes les fait suer, ou s’évanouir. Et encore, si ça ne tenait qu’à ça, ça resterait gentil. Sauf qu’ils avouent se frotter “sans faire exprès” contre des femmes dans le métro. Cette scène est très malaisante, mais pas pour les bonnes raisons. On dirait des ados puceaux attardés façon American Pie. Sauf qu’en 2018, ce type d’humour n’a plus lieu d’être. Il n’apporte rien au film, au contraire, ça le tire vers le bas. Et puis, l’arc narratif du “geek incapable de parler à une fille” est usé jusqu’à la corde, même The Big Bang Theory est passé à autre chose depuis bien longtemps.
C : D’autant que ce type de personnage contraste vraiment avec celui de Gabriel.
M : Gabriel est tiré à 4 épingles, dans des costumes taillés sur mesure. Dans la première scène, il sort d’une chambre d’hôtel dont le numéro est “007”, et ce n’est sûrement pas une coïncidence. Il n’aime pas trop qu’on s’attarde là-dessus, mais Kev Adams a commencé sa carrière il y a presque 10 ans, quand il était encore ado. Il a présent 26 ans, a fait plusieurs one-man show à succès, a été la star de la série Soda, diffusée sur M6, et du film Aladdin. Love Addict est l’une de ses passerelles vers des histoires “d’adulte”, et l’empêche de s’enfermer dans le rôle de l’éternel ado. En 2017, il a tenu le rôle principal de la comédie Gangsterdam, épinglée pour des blagues jugées racistes et grossophobes.
C : Du coup, est-ce qu’on va voir Love Addict ?
M : Oui, parce que c’est un bon divertissement, globalement réalisé dans un bon esprit. Par contre, tout est cousu de fil blanc, il y a peu de surprises. La psychologie de Gabriel n’est pas étudiée plus que ça, et c’est dommage. On ne comprend pas d’où vient son addiction à l’amour. Au contraire, la vie de Marie-Zoé est beaucoup plus scrutée, et intéressante, ce qui donne du relief à son personnage, tout sauf la damoiselle qui se fait désirer.
C : Love Addict est en salles depuis le 18 avril, merci Morgane Giuliani et à très vite !
Avec le sympathique « Love Addict », Kev Adams passe dans l’âge adulte
Elle s’attendait au pire, mais elle a finalement eu le droit à une rom-com sympathique. Morgane Giuliani a vu « Love Addict », film français dans lequel Kev Adams joue le rôle d’un séducteur compulsif. On verra ensemble ce qu’elle en a pensé.
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