Corentin : Dans la catégorie cinéma de genre, j’appelle Benjamin Benoit. Lui est aussi fan de films qui sortent un peu des canons de ce média, et c’est pourquoi il est allé voir Ghostland, mais pourquoi donc ce film Benjamin ? Et bonjour, tant qu’à faire.
Benjamin : Oui oui bonjour ! C’est très simple. Comme tout le monde j’aime ce qui est bien, j’aime le bon cinéma français, j’aime le nouvel Hollywood et son héritage, mais j’ai un petit fétiche pour ce qu’on appelle le cinéma de genre. Ca regroupe tout et n’importe quoi, du film de casse au film de sabre, mais en France on produit rarement des films barrés, des films d’horreur ou de science-fiction. Tiens, peux-tu me citer un film de SF français ?
C : Heu... ... écoute il faut remonter à l’été dernier, mais je dirai Valéri-
B : Ok laisse tomber. Mais ça vient ! Je prends pour exemple La Nuit A Devoré le Monde, excellent film de zombie à petit budget, où le protagoniste est coincé dans un immeuble haussmanien, donc parisien. Donc je vais le dire différement : je vous recommande tout ce qui est diffusé en festival alternatif. A savoir les Utopiales par exemple, ou à Gerardmer ; Le festival international du film fantastique dont la majorité de la compétition officielle est ou a été distribuée. Et le grand prix de l’édition 2018... c’est Ghostland, qui succède à It Follows et Grave. Quoi que vous en pensez, et quoi que vous puissiez tirer de cette chronique, je vous invite donc à aller voir Ghostland par définition. C’est par Pascal Laugier, auteur de The Secret et Saint-Ange. Ce monsieur est marié à un concept : des femmes souffrent, s’émancipent via cette souffrance, et le film dans lesquels elles évoluent mentent aux spectateurs. Alors, êtes-vous prêts ? PRÊTS POUR LA PEUR !!!
Extrait BA 1
C : Alors... Ghostland, un film d’horreur bien franchouillard ?
B : Oui euh... si tu occultes que 99% du film est en anglais et qu’il a été tourné au Canada... mais Mylène Farmer y joue un rôle majeur. Celui d’une mère qui s’installe avec ses deux filles dans une veille maison avec un grenier, des poupées cheloues partout et un plancher qui craque ! Que pouvait-il mal se passer ? Hé bien, qu’un duo de serial killers viennent les torturer des heures durant. Des maboules qui ont un fétiche un peu trop prononcé pour les poupées. Tu vois, dans le style vieillot, en porcelaine. Elles en réchapperont, mais ça ne sera pas sans dommages. Une quinzaine d’années plus tard, l’une des deux est devenue autrice à succès et coule une vie douce. Une vie un peu trop parfaite... sa soeur est définitivement devenue dingue, traumatisée par l’évènement. Sans doute aussi car elle y est restée avec sa mère.
C : Ouhla, c’est pas le bon sens qui les étouffe, j’ai l’impression.
B : Écoute, va savoir. Toujours-est-il que les trois femmes sont donc réunies au même endroit et les ennuis vont recommencer. Et c’est là que j’arrête de résumer le script puisque c’est aussi à partir de ce point que le film commence à faire joujou avec vous et vos attentes.
C : Comment ça ?
B : Ce serait spoiler, mais le film paraît un peu simple, et il joue avec les apparences. En revanche, je lui reprocherai d’être prévisible même s’il fait tout pour ne pas en donner l’air. Le film ne subvertit pas beaucoup les étapes iconiques de ce genre de film, et si tu as l’impression de savoir où tu vas, l’immersion sera moins grande. Tout ça est un peu téléguidé dans le cahier des charges, quelque part entre le slasher et le film de rapt.
Extrait BA 2
D’ailleurs, le film s’ouvre avec une citation de Lovecraft, qui fait quelques apparition dans le film. Le sel de l’horreur dans Lovecraft, c’est de détruire les connexions logiques entre les éléments pour induire la folie et la fantasy sommmbre. Je ne comprends pas du tout comment transposer cette référence à Ghostland. Je ne me suis senti jamais menacé.
C : La peur, parlons-en alors.
B : Parlons-en. J’ai trouvé ça particulièrement fatiguant et forcé. Il y a des jump scares tout le temps. TOUT LE TEMPS. Quelque part dans le film, tu en as un toutes les trois minutes. Et ils ne sont pas très bien amenés, car tu sais où poser ton regard, tu les vois venir et mentalement c’est double peine. Bouh une poupée qui fait peur ! ZDONG un visage chelou dans le champ ! RE-BOUH ! Une autre poupée ! Stop, film ! Tu n’as pas besoin de ça pour attirer mon att-
EXTRAIT BANDE-ANNONCE LE MONDE SECRET DES EMOJIS (ok deux fois en deux chros c’est beaucoup mais je calme avec après, promis)
AAAAH J’AI TRES PEUR. C’EST EFFRAYANT. Bien plus que Ghostland. Tiens, tu sais un truc qui fait peur dans Ghostland ? Les conditions de tournage.
C : Ah, oui, il y a une polémique qui l’entoure.
B : C’est justifié. Taylor Hickson, 20 ans, a été gravement blessée au visage lors du tournage. Lors d’une scène, elle devait coller son visage sur une porte vitrée tout en la cognant de toutes ses forces. Alors qu’on lui avait dit que c’était sans risque, la vitre s’est brisée, elle en a gardée une grosse cicatrice au visage. C’est déjà pas top, mais quand tu es une jeune actrice... elle a décidé de poursuivre pour négligence la maison de production qui s’appelle... Incident. Ca ne s’invente pas.
C : Allons-y : Ghostland est-il recommandé par les Croissants ?
B : Oui, mais petit oui. Pour le genre, pour la réalisation plus que correcte, mais je suis un poil circonspect. Il y a un tout petit manque d’âme dans ce métrage, porté par un casting qui donne tout. Peut-être aurez-vous une vision moins simpliste de ce film, mais je peux que vous encourager à soutenir ce type de cinéma. Je suis un peu mitigé-cochon d’inde mais si vous étiez interpellés par Ghostland avant cette chronique, allez-y gaiement. Parce que le cinéma français sans Christian Clavier existe, il respire, il évolue, il questionne. Vous avez pas besoin de mon avis pour nourrir ça.
C : Même s’il est en anglais et tourné au Canada.
B : Oui, bon.
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