Marathon de films : longs relais de longs métrages

C - Aujourd’hui, une fois n’est pas coutume, Geoffroy Husson de Frandroid vient nous parler de marathon. Mais tu trouves encore le temps pour des marathons Geoffroy, malgré le travail ?
G - C’est difficile, mais en programmant ça le week-end, ça passe.
C - Oui mais même, ça demande des entrainements…
G - Pas nécessairement, non. Enfin il faut avoir l’endurance oui, se préparer physiquement, mais en programmant bien ses nuits de sommeil ça passe.
C - Eh bien écoute, félicitations pour tes 42 km !
G - Mes quoi ? Ah mais non je comprends. Je ne parle pas de ce type de marathon. Je parlais de celui où on se pose sur un canapé avec des sodas, des pizzas, et où on enchaîne 5 ou 6 films pendant une douzaine d’heures d’affilée.
C - Ah oui d’accord, ça m’étonnait aussi…
G - Non mais Corentin ! Je ne te permets pas… bon d’accord, en effet c’est plus logique.
C - Et ça t’arrive régulièrement de te faire des marathons de films comme ça ?
G - De moins en moins, parce que comme tu le disais, ça demande malgré tout une bonne gestion du temps. Mais je m’en suis fait un petit bien sympa le week-end dernier, avec la saga Alien, c’était assez cool.
C - Ah oui, avec les quatre films !
G - Pas seulement non, parce que depuis, la Fox a étendu la franchise, donc on a commencé avec Prometheus, puis Alien Covenant. Et en fait, on a de plus en plus l’impression que les studios de cinéma conçoivent des univers non pas seulement pour des raisons commerciales, même si évidemment elles existent, mais aussi pour rattraper les séries TV.
C - Qu’est-ce que tu veux dire par là ?
G - Eh bien au début des années 2000, pendant ce qu’on a appelé l’âge d’or des séries TV, il y a une pratique qui a commencé à émerger, notamment avec 24 ou Lost, c’est le binge watching. Les spectateurs étaient frustrés de ne pas avoir la suite de leur épisode, donc ils les enchaînaient les uns après les autres, créant de fait ce qu’on peut considérer comme des marathons. A l’époque, il y avait bien des franchises au cinéma, mais elles se résumaient souvent à de simples trilogies. Depuis, il y a eu un gros boum du côté de l’industrie.
C - Comment ça ? Quel gros boom ?
G - Imagine te faire un marathon Star Wars dans les années 90. Tu avais seulement trois films, pour un total de 6 heures. C’est petit bras. Actuellement, si tu veux faire un marathon Star Wars tu en as pour vingt heures. Et c’est le cas partout.
Jurassic Park, Alien, Le Seigneur des Anneaux, tous ont commencé à développer des prequels ou des suites qui se prêtent plus ou moins bien au concept du marathon. Ca permet d’en découvrir davantage sur un univers que l’on apprécie, parfois même d’avoir des réponses à des questions que l’on ne s’était jamais posées comme l’identité du Space Jokey dans Alien, révélée par Prometheus.
C - Et tu penses que cette tendance vient uniquement des séries TV ?
G - En grande partie, mais pas seulement. Il y a une autre influence, plutôt majeure, c’est celle du studio Marvel. Imagine toi, tu es en 2008, tu vas voir Iron Man au cinéma, le premier film du studio, tu restes un peu après la fin, une fois que toute l’intrigue est résolue, et là tu découvres Samuel L. Jackson qui invite Tony Stark à rejoindre une organisation secrète.
[Insert Nick Fury]
G - C’est cette scène qui va figer en partie le concept des marathons de films. En une scène, le studio annonce que d’autres films de super-héros sont à venir et surtout qu’ils sont liés les uns aux autres.
C - Et du coup c’est ce qui va donner lieu aux Avengers.
G - Tout à fait ! C’est à la fin de la phase 1 que l’on va découvrir les Avengers. Une phase 1 qui se conclut après six films, soit une douzaine d’heures, encore une fois idéale pour un marathon. Et plus ça va aller, plus Marvel va vouloir prolonger cette idée de films qui s’enchainent comme des séries TV.
Ca se remarque notamment avec le dernier Avengers en date, Infinity War. Sans spoiler, on peut révéler que la fin laisse un gout amer et évidemment, elle donne envie aux spectateurs de voir le prochain épisode, que ce soit Captain Marvel, dont la sortie est prévue en mars 2019, ou Avengers 4, qui arrivera en salles en mai.
C - Mais du coup, si ça donne envie d’aller en salles, ce n’est pas l’idéal pour enchainer les films. Tu ne peux pas tous les regarder à la suite dans ton canapé.
G - Détrompe-toi Corentin, de plus en plus de salles de cinéma ont découvert l’intérêt du marathon. Je me souviens déjà qu’à l’époque de la sortie du 3e film Millenium, l’UGC Bercy, pour ne pas le citer, avait organisé une projection des deux premiers films. Pour la sortie de X-Men Days of Future Past, c’est le Grand Rex qui avait organisé un marathon sur deux jours avec tous les films sortis avant.
C - Ils le font pour motiver le public ? Pour lui rappeler l’histoire ?
G - Ils le font pour tout ça oui, mais surtout parce qu’ils savent que les fans qui viendront à une avant-première regarderaient les autres films de la saga chez eux, avant de venir. Du coup, c’est l’occasion pour les salles de faire des entrées supplémentaires. Et pour les fans, ça permet de vivre intensément des moments cultes, en communauté, comme ici le 30 novembre 2013 dans une vidéo mise en ligne par le Grand Rex :
[Insert Grand Rex]
G - Et pour certaines salles, c’est devenu un rendez-vous régulier. Je parlais à l’instant du Grand Rex, mais l’une des salles voisines, le Max Linder Panorama, organise régulièrement des nuits thématiques avec un marathon autour d’un réalisateur ou, souvent, d’une franchise. Une idée qui a également été reprise par le forum des Images avec les nuits Panic Cinéma organisées avec Chroma. Là aussi, l’idée c’est de permettre aux cinéphiles d’enchainer les films pendant toute une nuit, parfois même avec des tables rondes ou des conférences.
C - D’accord, je vois mieux l’idée. Merci beaucoup Geoffroy pour toutes ces explications et bon courage pour ta préparation au prochain marathon de Paris. Ça sera quoi ?
G - Probablement Harry Potter, maintenant qu’ils sont tous sur Netflix.
C - Ça marche, à bientôt !