C : Si vous étiez fan de la Petite Sirène, peut-être que vous serez attiré par The Shape of Water, en français, la Forme de l’Eau, le prochain film de Guillermo Del Toro, en salles le 21 février. Il y a beaucoup d’attente autour de ce long-métrage. Il est en tête des nominations aux Oscars, où il est présent dans 13 catégories, dont Meilleur film, Meilleur réalisateur, Meilleur acteur, Meilleure actrice et Meilleur scénario. Morgane Giuliani est là pour nous en parler aujourd’hui, bonjour Morgane !
M : Bonjour Corentin ! The Shape of Water est l’une des surprises cinématographiques de ce début d’année, après 3 Billboards, dont la chronique est disponible dans le brunch. Il jouit d’un succès d’estime énorme avant même d’avoir testé le ressenti du public en salles. C’est le nouveau film de Guillermo Del Toro. L’histoire se situe à Baltimore en 1962. Elisa Esposito est une employée de ménage sourde et rêveuse dans un grand laboratoire gouvernemental, qui mène des expériences étranges. Sa vie très ordonnée bascule lorsqu’elle se retrouve à nettoyer une salle où une créature aquatique est retenue prisonnière.
[EXTRAIT 1]
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M : On comprend vite que cette créature représente un enjeu de pouvoir entre les Russes et les Américains : on est en pleine Guerre froide. Cet amphibien nage mais peut aussi marcher, respirer sous l’eau et dans l’air. Il est régulièrement maltraité par celui qui l’a capturé, l’horrible Richard Strickland, un ancien militaire avec un goût prononcé pour la torture.
C : Le réalisateur, Guillermo Del Toro, a toujours eu un goût prononcé pour les créatures étranges.
M : Eh oui ! Pour ceux qui ne sont pas familiers du réalisateur mexicain, rappelons quelques-uns de ses faits d’armes. Il est notamment connu pour Le Labyrinthe de Pan, film horrifique sorti en 2006. En pleine ère franquiste, une petite fille se retrouve perdue dans un labyrinthe peuplé de monstres tantôt gentils, tantôt dangereux, comme la fameuse créature blanche qui des yeux à l’intérieur de ses paumes. Plus récemment, il a réalisé le 1er volet de la saga Pacific Rim, où des robots gigantesques se battent contre des aliens encore plus gigantesques. Bref, la filmographie de Guillermo Del Toro est marquée, en filigrane, par une fascination pour les monstres, la frontière entre réalité et imaginaire, et entre rêve et horreur.
C : C’est lui qui signe le scénario de The Shape of Water. C’est une histoire d’amour, c’est ça ?
M : Exactement. Elisa a un coup de foudre pour cet amphibien jamais vu. Dès la première fois où elle le voit, elle est touchée par sa condition de prisonnier, et sa fragilité face à ses bourreaux, alors que cette créature semble très puissante. Elle prend soin de lui en lui offrant des oeufs durs, et elle parvient même à établir une communication entre eux.
[EXTRAIT 2]
C : Est-ce qu’on n’a pas l’impression de regarder une version modernisée de la Belle et la Bête ?
M : Pas du tout. Cette créature est jouée par Doug Jones, qui a interprété de nombreux monstres dans l’univers de Guillermo Del Toro. Et elle est ultra réaliste. Del Toro voulait avoir le moins recours possible aux effets spéciaux. Il a fait appel au sculpteur Mike Hill, dont il est fan, pour construire un costume et des prothèses. En y ajoutant du maquillage et un tout petit peu de retouches numériques, le résultat est bluffant. Guillermo Del Toro arrive à rendre cet amphibien beau, malgré les écailles et tout ce qui va avec. Cet homme-poisson dégage beaucoup de virilité, de puissance, et une aura mystique. En tant que spectateur, on se surprend à le trouver séduisant. L’équipe s’est inspirée de la stature de Robert Redford dans le film Le Meilleur, et du coup, il évoque des canons de beauté hollywoodiens ancrés dans l’inconscient collectif.
C : Mais est-ce qu’on y croit, à cette histoire d’amour ?
M : Au début, c’est très déroutant. Mais vu qu’on finit par être nous-mêmes séduits, on comprend qu’Elisa puisse en tomber amoureuse. Le contraste entre les 2 personnages est énorme : l’homme-poisson peut être très agressif, alors qu’Elisa est très frêle, très mince et pâle, délicate, un peu maladroite. Mais la prestation de Sally Hawkins, qui joue Elisa, est si fine et vibrante que oui, on y croit. Elisa se reconnaît dans cette créature muette, comme elle, maltraitée à cause de ce qui la rend singulière. Leur relation est d’autant plus touchante qu’elle repose sur la langue des signes et la musique. Ils se comprennent sans se parler, en somme. Cette histoire d’amour est une ode au métissage, au dépassement des clichés.
[EXTRAIT 3]
C : Mais cette romance se retrouve compromise lorsque la créature se retrouve en danger.
M : Pas de spoil, puisque c’est dans la bande-annonce. Les Américains veulent disséquer l’amphibien pour l’étudier d’encore plus près. Elisa essaie de convaincre Giles, son voisin, et sa meilleure amie, Zelda, de l’aider à protéger son amoureux. J’en profite pour préciser que cette dernière est jouée par la géniale Octavia Spencer. Elle a les meilleures répliques du film, notamment quand elle se plaint en continu de son mari horrible. On a pu la voir récemment dans Gifted, Les Figures de L’Ombre et la saga Divergente. Bref, surveillez-la, car elle est vraiment en train de se faire une place à Hollywood.
C : Bien sûr, on ne va pas vous dire s’ils réussissent ou pas à sauver l’amphibien.
M : On peut au moins dire qu’il bouleverse la vie très rangée et ennuyeuse de 3 personnes, Elisa, Giles et Zelda. C’est ça la magie de Guillermo Del Toro : bouleverser le quotidien à coup de créatures extraordinaires, et ça fait plaisir de le retrouver dans ce registre. The Shape of Water est un beau conte de fées horrifique qui sait être aussi drôle qu’émouvant, et le fait qu’il se passe dans les années 60 ajoute un côté vintage charmant.
C : The Shape of Water arrive dans les salles le 21 février. Merci Morgane Giuliani et à très vite !
« The Shape of Water » : une histoire d’amour horrifique qui ne prend pas l’eau
Guillermo del Toro est connu pour ses monstres terrifiants, mais pas forcément pour ses romances. Morgane Giuliani, qui est allée voir son dernier long métrage « La Forme de l’eau », va nous démontrer que ce maître mexicain de l’horreur est tout à fait capable de concilier les deux avec brio.
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