Corentin : Aujourd’hui Geoffroy de Tom’s Guide va parler avec nous de vidéo à la demande. Ah oui, de Netflix en gros, c’est ça ?
Geoffroy : Pas tout à fait mon cher Corentin, pas tout à fait. Si Netflix a réussi à s’imposer en deux ans et demi comme la référence en France, c’est loin d’être le seul acteur, ni même le premier. L’idée aujourd’hui, c’est justement de faire un petit état des lieux des principales plateformes disponibles, puisqu’elles sont déjà utilisées par un français sur cinq en novembre 2017 selon Médiamétrie. Et on va commencer par la plus récente : OCS !
C : Mais ça fait hyper longtemps qu’OCS existe pourtant, c’est pas nouveau.
G : Alors oui, je te l’accorde, OCS, pour Orange Cinéma Séries, a été lancé sous forme de bouquet par Orange en 2008. Il y a 10 ans, donc. Mais à la base, il ne s’agissait que de chaîne cinéma thématiques, pour contrer les offres de Canal Sat. Depuis décembre 2017, OCS s’est enrichie de quelque chose que tous les fans de séries attendaient depuis des années en France : tout le catalogue HBO.
La chaîne câblée américaine a lancé ses quatre dernières années son offre de VOD par abonnement, via les services HBO Go et HBO Now. Seulement, s’il était disponible aux États-Unis, ce n’était pas encore le cas en France, jusqu’à décembre dernier.
Désormais, tous les abonnés à OCS peuvent regarder la quasi-intégralité du catalogue HBO, comprenant Game of Thrones, Six Feet Under, Les Sopranos ou The Wire. On compte seulement quelques séries absentes comme Sex and the City, Deadwood ou Oz. Surtout, l’abonnement vous permet désormais d’avoir accès partout, tout le temps à ces séries, et non pas uniquement quand OCS les rediffuse dans une version replay qui n’avait rien de pratique.
C : D’accord, donc en gros si on est fan des séries HBO, il faut se tourner vers OCS. Mais pour le reste ?
G : Pour le reste, il y a évidemment Netflix. Je ne vais pas te faire tout le topo, mais un léger rappel quand même. Netflix s’est lancé en France en septembre 2015 et a tout pulvérisé. D’abord avec sa facilité d’accès. Il suffit d’un simple identifiant que l’on peut utiliser partout. Sur son téléviseur connecté, son ordinateur, son smartphone, sa console ou même sa box TV Internet, à condition qu’un accord ait été conclu avec un FAI. Oui Free, c’est toi que je vise. C’est tout simple, là où OCS nécessite forcément de se connecter via un prestataire de service comme Orange ou Canal Sat.
Ensuite, Netflix propose un catalogue de séries originales inégalé par la concurrence. Non seulement le service a noué des partenariats prestigieux, comme avec David Fincher ou Tina Fey, mais a surtout lancé de nouveaux créateurs autour de séries événements. Il est difficile, voire impossible d’avoir les chiffres de visionnage des séries Netflix, mais compliqué de nier qu’elles sont parmi les seules désormais, à faire la une de la presse, excepté HBO, donc. Rien qu’en 2017, le service de VOD a lancé 13 Reasons Why, American Vandal, The Punisher, Dark ou Star Trek Discovery et Riverdale en Europe.
C : Effectivement, ça fait de grosses productions originales… mais Amazon aussi a un service de VOD non ? Ca vaut quoi ?
G : Ca vaut pas grand-chose pour l’instant. Amazon a en fait repris le même modèle que Netflix : lancer et produire des séries événements en exclusivité. Pour l’instant par contre, difficile de lutter. Si Netflix lance désormais une quinzaine de séries par an, Amazon Prime Videos ne peut compter que sur une poignée de hits dont The Man in the High Castle, American Gods et prochainement Good Omens.
Surtout, Amazon compte surfer à la fois sur le modèle de Netflix et sur les thématiques à succès imposées par HBO. Pour tirer profit de la vague Game of Thrones, Amazon a donc racheté les droits du Seigneur des Anneaux et va produire une série autour de l’univers de Tolkien, puis des spins off si ça fonctionne.
[Insert The hobbit to Isengard]
C : Mais il a quel âge ce mème enfin Geoffroy, ça va pas de réveiller les morts comme ça ?
G : Ah pardon, je suis de la vieille école.
Pour en revenir à Amazon Prime Videos, la plateforme est en panne d’inspiration, mais a les moyens de continuer à pousser jusqu’à ce que ça marche. Puisqu’il y a la force de frappe d’Amazon derrière. Surtout, pour les abonnés, le principal intérêt du service d’Amazon, c’est une quasi-gratuité. Tous les abonnés Prime sont par défaut abonnés à Prime Videos, sans supplément. C’est un peu comme monsieur Jourdain et sa prose, beaucoup de gens sont abonnés Prime Videos, sans le savoir.
C : Okay donc ça c’est pour les services américains… et les Français ?
G : En France, il n’y a rien, que dalle, peau d’zob.
C : Comment ça ? Il n’y a pas des offres chez Canal play ou SFR ?
G : Si, si, mais ça ne représente rien. Canal a eu l’intérêt de proposer le premier en France un service de VOD illimitée par abonnement avec Canal Play Infinity, mais le service était peu intuitif, avec des algorithmes de suggestion qui manquaient de finesse et surtout, peu d’exclusivités au lancement. Rends-toi compte, même les séries Canal+ comme Le Bureau des Légendes ou Mafiosa ne sont pas disponibles. Alors que c’est le même groupe ! Résultat : seulement 700 000 abonnés estimés, contre 1,5 million pour Netflix.
Pareil pour SFR Play VOD. Le service a voulu se lancer avec son offre Zive, annonçant pléthore de contenus inédits. Mais hormis Battlestar Galactica ou Castle, rien d’incroyable. Résultat, un nombre de 1,2 million d’abonnés annoncé en janvier 2017 qui comprend les offres groupées avec l’abonnement Internet. Même les observateurs se posent des questions sur la fiabilité des chiffres annoncés, d’autant qu’ils ne sont pas vérifiables.
C : Okay donc c’est réglé : OCS pour les séries HBO, Amazon si on a un abonnement Prime, pour la future série Le Seigneur des Anneaux et Netflix pour tout le reste, c’est ça ?
G : C’est ça, du moins pour l’instant, parce qu’un autre acteur majeur avance à pas de loups : Disney. Le leader mondial du divertissement va supprimer d’ici la fin de l’année la plupart de ses contenus de Netflix. L’idée sera à terme de proposer son propre service de VOD par abonnement et autant dire que les concurrents ont de quoi avoir peur.
C : Comment ça ? À cause de la Reine des Neiges ?
G : Pas seulement Corentin, pas seulement. Depuis dix ans, Disney a multiplié des acquisitions. La Reine des Neiges d’accord, mais Toy Story aussi, avec le rachat de Pixar, Avengers, avec le rachat de Marvel, tous les films et séries Star Wars et Indiana Jones avec celui de Lucasfilm. Et puis toutes les œuvres de la Fox depuis fin 2017. Pour rappel, on parle là d’Alien, d’Avatar, de Die Hard, de La Planète des Singes, de Titanic ou des X-Men. Bref, du très lourd.
[Insert House of Cards - Bed]
Autant dire que le marché n’est pas près de se figer et que d’ici l’an prochain le château de cartes conçu soigneusement par Netflix pourrait être complètement renversé.
C : En effet ! Merci Geoffroy pour ce point très éclairant sur l’état du marché de la VoD en France. À bientôt.
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