Corentin : Cette semaine nous revenons sur le rachat surprise de Red Hat, l’éditeur de solutions logicielles Open Source, par le géant de l’informatique IBM pour la modique somme de 34 milliards de dollars. Elodie Carcolse de la Réclame, revient sur les dessous de ce rachat surprise, mais finalement pas très surprenant, au doux parfum de guerre du cloud.
E.C. : Eh oui Corentin, en cette fin de mois d’octobre, l’annonce du rachat de Red Hat par IBM pour la somme stratosphérique de 34 milliards de dollars produit son petit effet dans le monde de la tech.
Il faut dire que Red Hat se présente comme le leader mondial dans la fourniture de solutions logicielles open source pour les entreprises. Par open source, il faut entendre que ces applications, téléchargeables gratuitement, sont susceptibles d’être modifiées et améliorées par une communauté de programmeurs. Red Hat est un acteur majeur du secteur, même s’il reste encore peu connu du grand public. La société distribue notamment sa propre version du célèbre système d’exploitation Linux, concurrent du nom moins célèbre OS propriétaire de Microsoft... Indice sonore
Extrait : https://www.dailymotion.com/video/xp512f
Windows donc, pour ne pas le citer.
Jusqu’à l’annonce du rachat, IBM ronronnait quelque peu avec son intelligence artificielle Watson et assistait en simple spectateur à la guerre du cloud qui se jouait devant lui. Amazon Web Services rafle la quasi totalité de la mise, quand Google Cloud Platform et Microsoft Azure se partagent les miettes.
Corentin : Mais ça, c’était avant !
E.C. : Exactement ! Grâce à Red Hat, Big Blue se relance dans la course du cloud computing et devient même le leader mondial du cloud hybride et de la gestion multi-cloud, comme s’en est d’ailleurs félicité la big boss d’IBM, Virginia Rometty.
Corentin : Alors, pour nos auditeurs, kézaco cloud hybride, multi-cloud…
E.C : Alors pour rappel, le cloud hybride, c’est la combinaison des environnements cloud Privé (les données sont stockées sur les serveurs de l’entreprise) et cloud Public (géré par un fournisseur tiers). Quant au multi-cloud, il s’agit d’outils qui permettent une gestion simplifiée de différents fournisseurs de cloud. Quand on veut en changer d’un simple clic ou quand on veut comparer rapidement des prix, par exemple. Ce que propose Red Hat, vous l’aurez compris.
IBM va donc débourser 190 dollars par action pour s’offrir la firme au chapeau rouge, valorisant du même coup la société à 34 milliards de dollars. Et tout ça, en cash s’il vous plait, c’est-à-dire sans les traditionnelles échanges d’actions inhérentes à ce type d’opération.
Corentin : La somme est énorme, mais finalement c’est le prix à payer pour espérer rivaliser avec un géant tel qu’Amazon, désormais très bien implanté dans le secteur…
EC : Oui, vous vous en doutez, cette acquisition ne doit rien au hasard : pour la patronne d’IBM, il s’agit d’anticiper sur la prochaine opportunité de croissance du secteur en connectant différents types de clouds. Comprendre, ne pas rater le coche de ce marché plein essor. D’après IBM, 80 % de la charge de travail des entreprises n’est toujours pas transposable dans le cloud en raison de la nature propriétaire, et donc fermée, du marché de l’informatique dématérialisée. Les perspectives sont donc colossales. Pour vous donner un exemple : rien qu’en France, le marché du cloud atteint 8,5 milliards d’euros en 2017, en croissance de 21%, selon le cabinet Markess International.
IBM a désormais un gros atout dans sa manche. Angel Diaz VP of developer technology et advocacy chez IBM revient sur cette bonne nouvelle pour le secteur.
Extrait : https://www.youtube.com/watch?v=IyfCXBTN_-I 1’18 à 1’30
Forcément, les deux parties se sont félicitées d’un tel rapprochement. Pour Virginia Rometty, je cite, « L’acquisition de Red Hat va changer la donne. Cela change tout sur le marché du Cloud”. Elle prédit même qu’« IBM va devenir le premier fournisseur mondial de cloud hybride”. De son côté, le patron de Red Hat a assuré qu’il restait “inébranlablement attaché aux innovations open source”.
Corentin : Eh oui, ce doit être un peu la crainte de la communauté open source de voir arriver un tel acteur dans un secteur réputé acquis aux chevaliers blancs du numérique : développeurs, défenseurs des libertés en ligne, etc.
EC: Oui, si cette réputation pouvait se vérifier il y a quelques années encore, l’open source s’est depuis largement répandu dans le monde de l’entreprise. Ce rachat est d’ailleurs cohérent sur plusieurs points : IBM n’a jamais été un ennemi de l’open source. Depuis les années 2000, la firme mise massivement sur Linux et n’hésite pas à le faire savoir : au moins deux milliards de dollars ont été investi dans cet OS libre.
Comme l’explique Todd Moore, vice président de l’open source, chez IBM dans une vidéo datée du 31 octobre dernier.
[extrait 1 https://www.youtube.com/watch?v=IyfCXBTN_-I de 0’24 “Since the 90’s à 0’47
IBM a assuré que la gouvernance ouverte de Red Hat ne sera pas remise en question, tout comme les contributions open source et sa participation dans la communauté.
Ensuite, IBM et Red Hat collaborent ensemble depuis cette époque là sur des projets communs. Ces longues fiançailles viennent donc tout simplement de déboucher sur un mariage en grandes pompes. Comme l’explique Todd Moore, vice président de l’open source, chez IBM dans une vidéo datée du 31 octobre dernier.
[Extrait https://www.youtube.com/watch?v=IyfCXBTN_-I 1’31 à 1’51 “great code together”.
Red Hat intégrera les équipe de l’Hybrid Cloud d’IBM en tant qu’entité distincte. La firme pourra conserver ses équipes et ses divers partenariats. Son PDG Jim Whitehurst est gratifié du titre de vice président d’IBM dans la foulée.
Corentin : Oui ça sonne un peu comme la suite logique d’une longue collaboration.
E.C. : Oui, mais pas seulement. Pour IBM, c’est surtout l’occasion de concurrencer Microsoft dans l’édition open source. Nos auditeurs se rappellent peut-être le rachat de la plateforme Github en juin dernier par le géant de Redmond pour la bagatelle de 7,5 milliards de dollars. Un rachat qui suscitait les craintes du côté des développeurs attachés à l’indépendance de la plateforme, tout en maintenant Microsoft sur le marché du logiciel libre.
Corentin : hum, j’ai comme un air de déjà vu. Les acteurs de l’industrie ne seraient-il pas en train de placer leurs billes sur ce juteux marché ?
E.C. : Tu ne crois pas si bien dire. Amazon et Microsoft sont également très bien implantés dans le monde de l’entreprise, le secteur de prédilection d’IBM depuis les années 90. Avec l’alliance IBM/Red Hat, les cartes sont rebattues, le « cloud », la sécurité informatique et l’analyse de données représentent désormais un peu plus de la moitié de son chiffre d’affaires. Microsoft et Amazon ont également fait du cloud une priorité de leur stratégie de croissance. Mardi, Microsoft a d’ailleurs annoncé être le premier acteur majeur du Cloud public en France à recevoir la certification Hébergeur de données de santé. Données de santé qui promettent de devenir un enjeu économique de taille.
Corentin : ça promet une compétition acharnée…
EC: Effectivement. Un tel enjeu justifie à lui seul la somme faramineuse déboursée par Big Blue pour acquérir le chapeau rouge. C’est non seulement la plus importante acquisition opérée par l’entreprise à ce jour, mais c’est aussi la troisième plus gros rachat de l’histoire de l’industrie des nouvelles technologies. C’est dire l’enjeu du pari !
Corentin : Bref, la guerre est déclarée, mais si ça peut contribuer à la diffusion de l’open source et des solutions cloud sécurisées au plus grand nombre, c’est peut-être pour le mieux finalement… qui sait ? L’avenir le dira. Merci Élodie ! Et à la prochaine fois !
En s’offrant Red Hat, IBM sort le Cloud de son chapeau
IBM vient de racheter Red Hat. C’est peut-être un détail pour vous, mais pour le monde de la tech ça veut dire beaucoup. En effet, ce géant du logiciel libre va permettre à IBM de fourbir ses armes dans la grande bataille du cloud en entreprise actuellement dominé par Amazon.
0:00
7:16
Vous êtes sur une page de podcast. En cas de difficulté pour écouter ce document sonore, vous pouvez consulter sa retranscription rapide ci-dessous.