Sur le marché PC du dématérialisé, Epic Games veut renverser la vapeur

Epic Games, here comes a new challenger (96 - 07/02/19)
Corentin : Vous piochez une chronique économie, rendez-vous en case jeux vidéo pour parler de cette relecture du mythe de David contre Goliath, appliquée… aux distributeurs de jeux dématérialisés. Salut Benjamin, de quoi vas-tu nous parler aujourd’hui ?
Benjamin : Alors en l’occurrence ce serait plus Goliath contre Goliath, ou Goliath contre un autre Goliath plus jeune qui claquerait des danses bizarres. Parce que là je m’apprête à vous parler de l’hégémonie de Steam et d’un challenger très sérieux, l’Epic Store.
C : Un petit rappel des titres sur Steam ?
B : Bien sûr, c’est la plate-forme de diffusion de l’entreprise Valve créée en 2003, qui jusqu’à très récemment imposait une présence autoritaire dans le marché de distribution dématérialisée de jeux vidéo, marché qu’il a lui-même codifié et qui a amorcé de nombreuses mutation dans l’industrie et sa distribution. Une plate-form d’importance majeure, iconique, où on peut aussi s’auto-éditer, et où on a même pu voter en tant que joueur pour greenlighter des projets indépendants. Si je vous dit que l’un de mes premiers jeux sur Steam était Portal, je pense qu’il y a de fortes chances que vous vous reconnaissiez. Et si je dis que j’ai une quarantaine de jeux achetés mais en attente, là je pense que c’est le monde entier qui va s’identifier. Bref, Steam regroupe environ 85% de parts de marchés sur tout ce qui se fait sur PC.
C : Et dans le coin rouge, l’Epic Store.
B : Alors attend. On va faire un petit pas de côté. On va aller en duplex de Brian David Gilbert, un cinéaste rigolo qui travaille pour Polygon. Il a créé une formule rigoureusement scientifique pour déterminer quel est le meilleur jeu de l’année, et dans sa formule, il y a un point crucial : l’importance dans la culture populaire. Le numéro 1 a des milliards de points en plus que le second, on l’écoute.
[FORTNITE]
B : Ah oui oui. Fortnite est probablement le jeu le plus influenceur de 2018, lui-même quand même très très très très trèèèèès inspiré de celui de l’année précédente, PlayerUnknown’s BattleGround. Les deux sont des battle royale où, lâché dans un terrain avec 99 autres gus, il faut être le dernier à survivre. Alors pourquoi PUBG s’est-il fait tant planter que ça ? D’abord parce que Fortnite a la courtoisie de ne pas avoir un nom à coucher dehors, de ne pas planter toutes les deux secondes, et d’être un peu plus joli. Et surtout, il y a des DES DANSES RIGOLOTES. Des danses rigolotes que fait Antoine Griezmann après avoir marqué dans le dernier mondial. Et Fortnite est GRATUIT avec des microtransactions, bref il a marqué l’essai de PUBG pour en faire quelque chose de mondialement iconique.
C : Autant dire qu’Epic Games a donc ramassé des bazillions en un an.
B : Je pense qu’ils peuvent se permettre d’aller au gastro de temps en temps, c’est certain. Et c’est alors que le 6 décembre, c’est le coup de tonnerre ! C’est l’effet d’une bombe ! Bref choisissez votre périphrase nulle préférée puisqu’Epic Games lance sa plate-forme de distribution à elle, fort d’une clientèle jeune et monomaniaque sur son jeu phare.
C : L’Epic Games Store a un gros atout pour attirer les jeux dans sa besace.
B : C’est le pourcentage qu’ils prennent sur les ventes de jeux. Steam s’est toujours réservé 30% du prix de vente d’un jeu. Epic Games baisse cette part à 12%, et estime publiquement que ce sera encore profitable pour la boîte. Et c’est une annonce pour le moment toujours respectée, et qui arrive au bon moment puisque Steam et sous le joug d’une kilotonne de reproches adressés par les développeurs du monde entier. Et Epic Games a su, en un gros mois, aligner les gros coups. Il y a proposé gratuitement Subnautica, l’un des jeux indépendants les plus populaires de 2018, sur sa plate-forme en gratuit. Et d’autres jeux tout aussi reconnus, comme What Remains Of Edith Fich, ont pris le relais depuis. Ces jeux restent gratuits du moment que tu les as téléchargés. Bonne aubaine, du coup voilà t’as déjà téléchargé l’Epic Games Store c’est gagné.
C : Il y a une histoire fofolle de recturement derrière l’Epic Game Store.
B : Ceux qui piquaient du nez, réveillez-vous, on arrive sur quelque chose d’assez drôle. Durant des années, les journalistes du monde entier ce sont servis sur un site nommé Steam Spy pour avoir des indications non-officielles sur les chiffres de ventes des jeux Steam. C’est Sergey Galyonkin, et il s’avère qu’il a été recruté… par l’Epic Store. Donc rétrospectivement, le mec qui tenait Steam Spy est devenu un espion industriel de Steam, c’est ironique comme on aime.
C : Et c’est pas tout. Maintenant, l’Epic Store a un autre atout lié à l’actu.
B : Parce qu’il a désormais des gros jeux attendus qui sortiront en exclusivité sur l’Epic Game Store, et pas sur Steam. The Division 2 a ouvertement snobé la librairie de Valve. C’est aussi le cas de Metro Exodus, troisième épisode d’une saga de jeux de tir assez connue. Ceux qui l’ont précommandé sur Steam quand il était encore proposé y auront droit tout de même. Et Deep Silver, l’éditeur derrière Metro, a clairement indiqué que c’était pour les 12% de commission envers la plate-forme. Si eux le font… d’autres vont suivre, et on s’apprête à voir un véritable marché concurrentiel émerger, enfin. Bon, pour nous, au bout de cette chaîne, il va falloir jongler entre les services. Ah et Metro Exodus ça sort le 15 février chez nous. Et en attendant, à la prochaine.
C : Merci pour ces explications ! Bon ben moi je retourne sur Netflix.
B : Ah mais perso j’ai payé Amazon Prime, j’adore avoir des animes traduits avec Google Trad.
C : Ah non mais pour les animes t’as Crunchyroll et Wakanim.
B : Ou Netflix. C’est tellement pratique.