Si on peut être certain d’une chose, c’est que le lancement de la Nintendo Switch part sous de bien meilleurs auspices que son prédécesseur, la Wii U. Nombreux sont les articles faisant état de la pénurie de machines, des queues incroyables qui se forment devant les magasins, notamment au Japon et des témoignages des heureux possesseurs qui louent l’aspect hybride de la machine. Annoncée en octobre 2016 et à quelques mois de la période cruciale de fin d’année, faisons le point sur ce que la nouvelle console de Nintendo a réussi à faire, là où elle a péché et ce qui lui reste à accomplir.
Et pour commencer cette chronique jeu vidéo, souvenez-vous, c’était le 20 octobre 2016, et sur la chaîne YouTube officielle de Nintendo, la planète jeu vidéo découvrait cette bande-annonce.
[Extrait teaser]
Après des mois et des mois de spéculations sur ce qu’on connaissait sous le nom de NX, la Switch montre enfin sa bouille et, il fallait s’y attendre, les retours sont divisés. Entre ceux qui la trouvent moche, ceux qui la trouvent fine, ceux qui adorent les couleurs, ceux qui trouvent que le nom des manettes, les Joy-con, est ridicule, tout le monde à son avis.
Le 3 mars dernier, la console sort. Et donc ? Qu’en pense le public ? Écoutez, les chiffres de ventes parlent d’eux-mêmes. En 4 mois, 4,7 millions de consoles ont trouvé preneur dans le monde. Autre chiffre qui parlera peut-être un peu plus à nous autres, franchouillards, la Switch a réussi le plus gros lancement en France toutes consoles confondues avec 105 000 machines écoulées.
Mais tout n’est pas rose : Nintendo n’arrive pas à pallier un problème de taille, le nombre insuffisant de consoles qu’il parvient à produire. Résultat, la machine se fait rare sur les étals, au Japon les files d’attente se multiplient et les spéculateurs se frottent les mains en laissant le prix exploser. Certains profitent même de la crédulité de certains pour le vendre à prix d’or… des boîtes de Switch vides.
Nintendo est connu pour avoir des difficultés chroniques à ce niveau là. Il suffit de prendr le cas des amiibo ou des Nes Classic Mini pour comprendre que l’approvisionnement insuffisant est un souci chronique pour la firme de Kyoto.
En ce qui concerne la Switch, ce n’est pas uniquement de la faute de Nintendo cela dit. Le Wall Street Journal révèle que Toshiba, le fournisseur de mémoire flash doit avant tout accéder aux demandes d’autres fournisseurs bien plus fortunés et dépensiers, en l’occurrence Apple. Or, si en 2016, Apple a vendu 200 millions d’iPhone, Nintendo espère uniquement en vendre 100 millions au total et encore, sur la totalité du cycle de vie de la console.
Le prochain vrai test commercial de la console sera les fêtes de fin d’années. Car avec le Black Friday américain et Noël, l’idée d’offrir une Switch à ses proches ou à soi-même risque d’être répandue. Avec un nouveau Mario majeur prévu pour octobre, il y a fort à parier que la bonne dynamique entamée depuis mars sera d’autant plus forte. Reste à voir si Nintendo réussira à tenir le rythme à la fabrication. Ce qui est très loin d’être garanti.
Mais comment peut-on expliquer cet engouement ? Qu’est-ce que cette machine a de plus que la Wii U, par exemple ? Qui a été un vrai et douloureux échec commercial pour Nintendo.
Pour commencer, le concept phare de la console, la « key feature » en bon français, marche. Le gimick marche, mais en plus, il est particulièrement visible ! Nintendo peut ainsi facilement le présenter dans des publicités. Réclames dans lesquelles, finalement, ont voit plus les joueurs que le jeu en lui-même. Ce type de marketing ne vous dit rien ? Allez ! Je vous donne un petit indice.
[Extrait pub pour la Wii]
Eh, oui. La Switch bénéficie du même atout marketing que la Wii ! À savoir un concept que les gens peuvent comprendre du premier coup d’oeil. L’aspect hybride. Cette façon qu’à la machine de passer de la console de salon à la console portable en clin d’oeil. Le fait de pouvoir l’emmener partout facilite même le bouche-à-oreille ! Quoi de mieux pour en mettre plein les yeux en extérieur que de prendre sa console avec soi, de la poser sur une table, de décrocher les deux manettes et d’en donner une à un ami pour une partie de Mario Kart 8 au débotté ? Compliqué de faire plus polyvalent et pratique que ça.
Mais une console sans jeux est une console destinée à être délaissée et ça, Nintendo l’a parfaitement compris. Le constructeur a notamment tiré les leçons de la Wii U qui avait connu un line-up piteux sur sa première année. Ici, Nintendo se base sur une stratégie à 4 pieds. Comme ça, si jamais un pied casse, le tabouret sur lequel repose son succès reste encore debout.
Premier pied, Nintendo peut se targuer d’avoir sorti son meilleur jeu depuis très longtemps avec Zelda Breath of the Wild. Des succès critiques de cette ampleur se font extrêmement rares, surtout sur une série comme Zelda qui a toujours eu un mal fou à se renouveler. Bref, Nintendo s’est trouvé une figure de proue parfaite pour le lancement. Super Mario Odyssey semble également parti pour énormément plaire à la presse comme aux joueurs. Ce dernier rafle prix sur prix dans les tous les salons jeux vidéo mondiaux, et les premiers retours sont très bons. Je peux moi-même confirmer le sentiment général.
Passons au deuxième pied de ce tabouret, Nintendo a su retrouver la confiance de très gros éditeurs tiers et en premier lieu : Ubisoft et Bethseda. Le premier a carrément développé et édité un crossover pas dégueu avec Mario + Lapin Crétins : Kingdom Battle. Le tout avec la bénédiction de Nintendo ! Quant à Bethesda, il ressort son best-seller, Skyrim, sur la Switch. Il a également annoncé l’arrivée de DOOM 2016 et du prochain Wolfenstein, ce qui n’est pas rien. EA et 2K donnent également un petit coup de main et se sont arrangés pour sortir une version de leurs FIFA et NBA2K respectif, histoire de varier les plaisirs et, sait on jamais, vendre quelques jeux au cas où la console serait un succès commercial.
Troisième pied maintenant, pour compléter, Nintendo réutiliser le line-up de la Wii U et il a entièrement raison ! Car la Wii U possède d’excellents jeux, mais le problème c’est que pas grand monde n’y a joué ! C’est pour cela que Nintendo ressort l’excellentissime Mario Kart 8 Deluxe, une mise à jour du très rafraîchissant Splatoon et même Pokken, dans une version enrichie. Grâce à ça, Nintendo a réussi à soutenir le rythme assez incroyable d’une grosse sortie par mois ! Voilà de quoi rester durablement sur la scène médiatique et laisser le projecteur braqué sur la petite dernière de Nintendo.
Enfin, quatrième et dernier pied de ce tabouret qui semble bien solide, Nintendo s’est mis les indépendants et les petites productions dans la poche ! Dans tous les sens du terme. The Binding of Isaac, Cave Story, Sonic Mania, tous sortent sur Switch, et ce n’est pas la PAX 2017 qui va démentir cette tendance : en effet, les titres sortant exclusivement sur PC et Switch étaient légions. Bref, la Switch s’apprête à prendre la relève de la PS Vita en terme de plateforme indé portable, et pour le coup, personne ne va aller s’en plaindre.
[Pub Splatoon]
Difficile de voir une vraie raison pour laquelle la Switch arrêterait d’un seul coup de se vendre comme des petits pains. L’objet, s’il n’est évidemment pas parfait, parle à tout le monde, ses qualités sont intrinsèques, il est polyvalent, il y a un vrai wow effect, la ludothèque est déjà impressionnante et fournie… Pour arrêter une dynamique pareille, il faudrait que Nintendo prenne successivement une série de très mauvaises décisions.
Or, depuis quelque temps, on sent que Nintendo, société qui a un mal fou à se réformer, fait quelques pas vers la modernité. Cela se sent dans les jeux, qui prennent en compte du retour des joueurs. Ou dans la gestion de son infrastructure online qui, si elle reste encore bien archaïque, est également à mille lieues de ce qu’elle était il y a encore 3 ans. Ou encore dans la décision de supprimer le zonage par région de sa console.
Noël sera un test, mais l’année 2018 aussi, car du côté de chez Nintendo, les très très gros titres semblent s’arrêter à Mario Odyssey pour le moment. On se doute bien que la firme en garde sous la pédale, notamment avec Metroid Prime 4 et un vrai RPG Pokémon développé spécifiquement pour la Switch, mais rien de ces projets n’a encore été dévoilé… Il serait préférable que des annonces soient faites dès les premiers mois de l’année prochaine.
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