Christine and the Queens s’arrange un retour référencé avec son deuxième album, « Chris »

M : Attention Corentin, t’es prêt ? On va jouer à Questions pour un champion.
C : Ok ok, vas-y, je suis prêt !
M : Attention : vous aussi, chers auditrices et auditeurs des Croissants, vous pouvez jouer de chez vous. Allez, TOP C’EST PARTI. Je suis l’une des artistes françaises incontournables de ces 5 dernières années. Je viens de Nantes, et mon vrai nom est Héloïse Letissier. À la base, je rêvais d’être metteuse en scène de théâtre, mais on m’a dit que ce n’était pas possible pour une femme. Ça m’a franchement énervée. Après une grosse rupture amoureuse, je suis partie me consoler à Londres, où j’ai découvert une scène drag queen qui m’a épaulée. J’ai décidé de lui rendre hommage à travers mon nom de scène. Dernier indice : en 2014, j’ai sorti un premier album qui s’intitule Chaleur Humaine, sur le label Because Music. On y trouve notamment le tube Saint-Claude, dont j’ai eu l’inspiration après avoir assisté à une altercation dans un bus. Je suis ? Je suis ? Je suis ? Je suis ?
C : CHRISTINE AND THE QUEENS !
JINGLE
M : OUI, BRAVO CORENTIN, tu remportes… une encyclopédie Larousse de 20 volumes en cuir relié et un voyage de 2 jours à Madagascar, logement non compris. Bravo !
C : On espère que cette intro un peu speed vous a aidé à vous réveiller, chers auditeurs. Bon allez, trêve de plaisanterie, passons aux choses sérieuses, puisque Morgane Giuliani est ici pour nous parler de Chris, le deuxième album de CATQ, sorti le 21 septembre, toujours chez Because Music.
M : D’ailleurs, on va se réécouter un bout de Damn Dis-moi, le premier single officiel.
EXTRAIT 1
C : Alors Morgane, j’ai cru comprendre qu’il fallait parler de Chris, et non plus de Christine and the Queens.
M : Tout à fait. Lorsque la chanteuse est revenue au début de l’été, après presque un an à potasser ce nouveau disque, elle a annoncé un nouvel alias artistique : Chris. Les cheveux courts, une coupe à la garçonne, l’air insolent, Chris ressemble à une petite frappe des années 60. D’ailleurs, le clip de Damn Dis-Moi, que je vous invite à regarder, se déroule façon West Side Story. Sur les hauteurs d’un building, Chris et sa bande dansent, avec des mouvements qui allient parfaitement masculin et féminin. Depuis les tous débuts de sa carrière, Chris a joué avec le genre, avec une pop aussi forte que sensible. Un talent qui lui a valu d’exporter sa musique bien au-delà de nos frontières : elle connaît un très beau succès au Royaume-Uni et aux États-Unis, Madonna l’avait même invitée sur scène à Paris.
C : Mais ce nouvel album est beaucoup plus brut de décoffrage.
M : Oui, Héloïse Letissier nous avait prévenus. Chris est un album chargé en testostérone. Et dans quel sens ? La chanteuse, qui compose aussi elle-même ses morceaux, propose des titres énergiques, avec des paroles sensuelles.
Elle est allée puiser dans des banques de sons gratuites, dans des styles funk à la Michael Jackson de la fin des années 80. Le King de la pop est l’une de ses idoles. Et c’est là que le bas blesse un peu. Pour faire simple : on se retrouve avec des titres super efficaces - personnellement, je peux avoir Damn Dis-moi dans la tête toute une journée, mais on se demande un peu où est Chris là-dedans.
EXTRAIT 1suite
C : Il y a eu une polémique à ce propos, non ?
M : Oui, lorsque Damn Dis-Moi est sorti, une partie des internautes a crié au plagiat de mélodies présentes sur Logic Pro, le logiciel professionnel de création musicale d’Apple. À tel point que la chanteuse s’est justifiée sur Twitter début août. Elle écrit : “Je n’ai pas plagié une chanson, ce que j’ai pris est libre de droits”, et ajoute : “95 % des raps d’aujourd’hui empruntent des chansons connues. J’ai samplé une boucle libre de droits, sur laquelle j’ai ajouté des paroles, la mélodie de chant, les arrangements. C’est une technique de création comme une autre. Quand Gainsbourg empruntait des mélodies à Chopin, est-ce que c’était du plagiat ?”
C : Le recours au sample, c’est-à-dire, à des boucles mélodiques empruntées à des morceaux existants, est une pratique extrêmement courante dans la musique contemporaine, c’est juste que la pop s’y prête un peu moins souvent que le rap ou la musique électronique.
M : D’ailleurs, sur son 1er album, on trouve une jolie reprise de Paradis Perdus, chanson emblématique de Christophe, à laquelle elle ajoute un verset de Heartless, titre de Kanye West.
C : Mais sur plusieurs titres de ce 2e album, le travail de réappropriation, de réécriture de samples, paraît moins poussé.
EXTRAIT 2
5 Dollars
M : Ça sonne un peu facile. Et un peu daté par moments. C’est même un peu dérangeant sur certains morceaux. C’est le cas sur le titre Le G, dont la basse funky et les coups de synthé étincelants sont agréables, mais ont un air de réchauffé. Les oreilles s’accrochent à ce qu’elles connaissent déjà, et ne prêtent pas trop attention au reste. Ce qui est vraiment dommage, vu le talent d’écriture de Chris. Personnellement, je suis plus émue quand elle s’aventure dans des contrées électropop inconnues, moins référencées, qui lui sont propres. Parmi eux, il y a Les yeux mouillés, ballade amoureuse sublime et incandescente, Goya! Soda!, un morceau qui prend son temps, et dont la basse obsédante s’efface peu à peu au profit d’un piano qui casse le rythme. Et puis, ce très, très beau titre : La Marcheuse, le dernier single en date, accompagné d’un joli clip où il est question de torero.
EXTRAIT 3
M : Chris est un bon deuxième album, un cap toujours très difficile pour les artistes dont le premier disque a été un énorme succès. Mais il faut aimer la funk brûlante des années 80 pour apprécier ce disque, on est loin de la pop éthérée et aérienne de Chaleur Humaine. Mais le voyage vaut quand même le détour.
C : Chris est disponible depuis le 21 septembre chez Because Music, et sur les plateformes de streaming. Elle se produira à l’AccorHotels Arena de Paris les 18 et 19 décembre prochains. Merci beaucoup Morgane Giuliani et à très vite !