C : Salut Morgane ! Comment ça va aujourd’hui ?
M : Très bien Corentin ! Et toi ?
C : Très bien aussi ! On se retrouve pour parler musique, c’est ça ?
M : Tout à fait. Avec un groupe dont le retour fait oublier la grisaille de l’automne. Il s’agit bien sûr
de LCD Soundsystem, nom de scène du grisonnant James Murphy, 47 ans. On écoute Call The
Police, single de American Dream, disponible depuis le 1er septembre.
[EXTRAIT CALL THE POLICE]
C : Grosse rentrée musicale décidément. Pourquoi ce retour de LCD Soundsystem est-il si
particulier ?
M : Parce qu’en 2011, le groupe avait pris tout le monde de court en annonçant sa séparation,
alors qu’il était au sommet de sa gloire avec son 3e album, This Is Happening. Leur dernier
concert a eu lieu devant 20.000 personnes habillées en noir et blanc à la demande de James
Murphy, comme à un enterrement, au mythique Madison Square Garden de New York. Un concert
de plus de 3 heures, avec de nombreux invités, immortalisé dans un documentaire live incroyable,
Shut Up And Play The Hits, sorti 3 ans plus tard. James Murphy avait préféré arrêter LCD
Soundsystem en plein vol, plutôt qu’attendre une éventuelle chute. Il est ensuite retourné à sa
principale activité, la production, auprès d’Arcade Fire et des Yeah Yeah Yeahs notamment. Il a
aussi joué des percussions sur le tout dernier album de David Bowie, BlackStar.
C : Des collaborations plutôt classes. Comment James Murphy en était arrivé à créer LCD
Soundsystem ?
Cet ancien batteur et ingénieur du son a créé LCD Soundsystem à l’âge canonique de 31 ans,
après avoir enchaîné les groupes sans lendemain pendant une dizaine d’années. Dès son premier
album, éponyme, sorti en 2005, LCD Soundsystem y offre des hymnes nocturnes, ciselés, souvent
cyniques, auxquels il est difficile de résister. Avec à la clé 2 nominations aux Grammy Awards.
Petite piqûre de rappel avec Daft Punk Is Playing At My House.
[EXTRAIT]
C : C’est quoi la touche de LCD Soundsystem ?
M : Un son unique, qui pioche aussi bien dans l’électro - même si James Murphy n’aime pas ce
terme -, le rock, le post-punk, le new-wave ou le disco. Et tout ça, parfois dans une même
chanson, créant des titres avec des évolutions euphoriques. Dans sa musique, LCD Soundsystem
évoque les difficultés à être un adulte, ou, se moque, paradoxalement, des vices de la vie
nocturne. Les morceaux sont longs, parfois une dizaine de minutes, reposent sur la répétition, qui
vire à l’obsession. Comme si James Murphy cherchait la chorégraphie musicale parfaite pour
prendre possession de votre cerveau. En live, c’est canon. Les concerts de LCD Soundsystem
sont hypnotiques, jubilatoires, poussent à la transe. C’est d’ailleurs par la scène qu’il a amorcé son
retour, en 2016, dans différents festivals, dont We Love Green en juin 2016, festival bobo-écolo-
hipster proche de Paris. Les 13 et 14 septembre 2017, c’est sur l’Olympia que le New-yorkais a
jeté son dévolu.
C : À côté de cette mini-tournée des festivals, LCD Soundsystem a pris le temps de peaufiner son
nouvel album, American Dream. Quelques dates en Asie et en Australie avaient même été
annulées pour donner la priorité à l’enregistrement de ce nouveau disque, non ?
M : Tout à fait !
C : Comment ont-ils justifié ce retour ?
M : Alors, James Murphy a dit en interview avoir évoqué ses envies de reformation à David Bowie.
Ce dernier lui aurait demandé “Est-ce que la perspective d’une renaissance de LCD Soundsystem
te met mal à l’aise ?” Ce à quoi James Murphy aurait répondu “oui”, et Bowie lui aurait dit “Alors
fais-le, tu dois faire ce qui te met mal à l’aise”.
C : Voilà un bon conseil ! Est-ce que Bowie a eu raison d’encourager James Murphy à ressusciter
LCD Soundsystem ?
M : Commercialement oui, puisque c’est la première fois que LCD Soundsystem se retrouve
numéro 1 des ventes aux États-Unis. Mais il offre un retour plus sombre que prévu. American
Dream évoque des thèmes durs comme la dépression, la peur de soi et des autres, la rupture
sentimentale ou des problèmes de société. On écoute le titre éponyme, American Dream.
[EXTRAIT]
C : C’est assez sombre, en effet.
M : Voilà. On est assez loin des chansons trashy dance/rock façon Drunk Girls ou Dance Yrself
Clean. James Murphy invoque surtout l’esprit torturé post-punk/new-wave à la Joy Division/New
Order avec une basse lancinante très présente, des percus inquiétantes, des synthés invitant à la
déprime, des réverbérations à tout-va et des timides envolées. La répétition, qui fait le charme de
LCD Soundsystem, se fait bourdon.
C : C’est un disque qui file le cafard, donc ?
M : Ce n’est clairement pas un album à écouter si on a un gros coup de mou. D’autant
qu’American Dream est un disque homogène, aucun titre ne se distingue véritablement des autres.
Par contre, c’est un bel album, et on sent que beaucoup de travail a été fourni. Les chansons
durent minimum 5 minutes, la plus longue étant la dernière, black screen, qui culmine à 12
minutes. Mais voilà, ça manque d’audace. Les morceaux les plus enlevés, comme call the police,
se révèlent prévisibles, pour peu qu’on aie l’oreille un peu affutée. Si vous cherchez le LCD
Soundsystem dansant et insolent, allez directement au titre tonite, qui se moque gentiment des
tubes électro à la mode.
[EXTRAIT]
C : Est-ce que les fans vont quand même s’y retrouver ?
M : Complètement. Certains gimmicks sonneront familiers aux inconditionnels de LCD
Soundsystem, que ce soit avec les titres how do you sleep ou oh baby, qui a des réminiscences du
tube Someone Great. Mais ceux qui attendaient un album euphorique pour danser jusqu’au bout
de la nuit seront sans doute un peu déçus.
C : On leur filera des Kleenex alors. Merci Morgane, à bientôt !
M : Merci Corentin, à très vite !
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