Angèle : Tu te souviens Corentin quand j’ai fait une chronique longue de 7 minutes pour dénoncer le manque d’infrastructures pour les cyclistes en France ?
Corentin : Ah oui, oui…
A : Bah ce n’est pas le seul problème, et les Franciliens le savent bien. (EXTRAIT JT VELIBS)
Le fiasco des nouveaux Velibs… un problème qui, s’il touche les franciliens principalement, dénote aussi d’un problème plus global d’innovations et de gestion de celles-ci.
C : En octobre dernier commence un bouleversement : la fin des Vélibs JCDecaux
A : Ces Velibs lourds de 22kg. Ces stations vident ou sans places. Ces Vélibs cassés, détériorés. Smovengo promet la révolution !
L’entreprise franco-espagnole gagne au consortium d’attribution de la gestion des vélos en libre-service dans la capitale après la fin du bail, en quelques sortes, de JCDecaux.
Le projet fait rêver : des vélos et bornes renouvelées au 31 mars 2018, l’extension du dispositif à 68 communes de la métropole du Grand Paris, des vélos électriques et surtout une nouveauté : le système Park+. La possibilité d’accrocher son vélo à un autre vélo si la station est pleine.
L’aubaine.
A l’époque, nous cyclistes, nous chantonnions ça (EXTRAIT 2)
C : Je suis désolé de casser ton délire Angèle, car les galères ont très rapidement commencé…
A : Et avec ça, notre espoir. (Bruit verre qui se casse).
A l’heure où j’écris ces lignes, en juin 2018, seulement 670 stations sont en service sur les 1 400 prévues. Pire encore, les salariés de Smovengo sont en grève depuis avril dernier. C’est un fiasco total. Les Vélibs sont presque tous inutilisables.
C : Mais quel est le problème ?
A : Il y en a deux. Le premier, c’est que les travaux ont pris du retard. Six semaines, selon Jorge Azevedo, directeur général de Smovengo. Il déplore le recours qu’à fait JCDecaux à la décision de la mairie de Paris de choisir Smovengo et pas eux à la gestion des Vélibs. Il s’en est expliqué aux Echos (EXTRAIT 3)
« Depuis le début, on est sur un chantier avec un temps d’exécution très court. On a perdu six semaines avec le recours JCDecaux. Et sans changer les dates de mise en service. (…) Au début de ce processus, il y a eu toute la négociation de reprise du personnel JCDecaux. On a retardé le recrutement de nos équipes pour ne pas avoir les gens en doublon. Forcément, ça a eu un impact sur l’organisation de Smovengo«
Ce sont des termes un peu techniques mais effectivement, ce recours a bien eu lieu en avril 2017. JCDecaux déplorait alors que Smovengo exclut la reprise de l’ensemble de son personnel dans son projet et que cela allait reposer sur, je cite, »de nouvelles équipes inexpérimentées, moins nombreuses et à des conditions sociales et salariales dégradées ».
C : Mais ce recours a été rejeté dans la foulée, en mai
A : Oui. Smovengo a donc eu un peu moins d’un an pour mener à bien son projet et ainsi, offrir ses nouvelles stations comme cela était prévu, dès janvier 2018.
C : S’est ajouté à cela un autre souci : celui de l’électrification.
A : Smovengo a fait le choix de faire fonctionner deux tiers des stations de vélos sur batteries. Des batteries qu’il faut donc… recharger.
Le principal accroc, donc, selon Jorge Azevedo, c’est l’électrification des stations et des problématiques de terre.
Il dit que si une borne n’est pas en conformité, elle peut représenter une menace d’électrocution. Donc, toute la station est en « réserve », jusqu’à qu’elle le soit.
C : Ce n’était pas possible de l’anticiper ?
A : Selon lui, non. Le sous-sol parisien, je cite, « c’est 150 ans d’électrification ». Autant de raccordage différents à faire, donc, selon les sols où sont placées les bornes. Mais il reconnait quand même les tords de Smovengo. Enfin, un peu. (EXTRAIT 4)
« Oui, on aurait pu anticiper certaines phases. Lancer le projet dans un délai aussi court, avec toutes ces innovations était vraiment ambitieux"
C : Sauf que : ajouter à tout cela une bonne grosse grève de personnel (EXTRAIT 5)
A : Mi-avril, 85% des agents Smovengo se mettent en grève d’après leurs représentants et réclament de meilleurs conditions de travail. Les anciens salariés de JCDecaux repris par Smovengo dénoncent une perte de salaire de près de 1000 euros par mois et la fin de certaines majoration, comme celle du travail du dimanche et des jours fériés.
Et vu que les vélos fonctionnent avec batterie, s’il n’y a plus de salariés, qui va les remplacer ? Et bien personne. Donc en plus du manque notoire de stations comparé à ce qui était initialement prévu, notez l’incapacité totale de rouler avec le peu de Velibs encore existants.
C : Plusieurs grévistes se sont d’ailleurs fait licencier
A : Ce qui est rare en France. Le tribunal de grande instance de Paris avait estimé à la mi-mai que la grève était illicite, faute de préavis. Les salariés de Smovengo ont décidé de saisir les Prud’hommes.
C : Avec tout cet énorme couac, c’est bien évidemment la maire de Paris Anne Hidalgo qui n’est pas contente
A : Oui, mauvaise pub pour la capitale. Un tiers des 300 000 abonnés se sont déjà désinscrits de ce service. En mars dernier, Anne Hidalgo était l’invitée de Nicolas Demorand sur France Inter (EXTRAIT 6)
“Moi ce qui m’importe, puisque je suis d’accord avec vous ça ne va pas, ce qui m’importe c’est que ça marche, c’est pas de casser le marché (...) nous avons, et je mets la pression, y’a des pénalités qui sont très très fortes près de un million d’euros par mois de pénalité. Il y a effectivement les services de la ville, mêm esi ce n’est pas de notre responsabilité, qui épaulent pour que cela aille plus vite”
A l’époque, la maire de Paris promettait une mise en service total des vélib à la fin-avril, début mai. Ce qui n’a pas été le cas, vous l’aurez compris.
Anne Hidalgo est tenue responsable de ce fiasco, bien que Smovengo ait été choisie par un consortium regroupant près d’une soixantaine de communes partenaires. Mais comme le dit Paris Match, on sent bien que le sujet gène la maire de Paris, qui semble ne pas trop quoi savoir faire de plus. D’ailleurs, nous avons eu peu de nouvelles de la mairie de Paris plusieurs semaines à ce sujet. Difficile de savoir quand les Vélibs seront pleinement opérationnels.
C : La solution serait-elle de rompre le contrat avec Smovengo et d’en trouver un autre ?
A : Résilier ce contrat se traduirait par la disparition totale des Vélib pendant deux ans. C’est le temps pour réattribuer le chantier. Du coup, mieux vaut encore quelques mois avec un peu de Vélibs ou deux ans sans aucun vélo ? La question mérite de se poser.
C : Donc si je récapitule : pour le moment, seulement 670 stations sont en service, sauf que les salariés sont en grève donc personne pour remplacer les batteries des vélos électriques, grève qui a été jugée illicite et qui ira donc jusqu’aux Prud’hommes, c’est bien ça ?
A : Tu as tout compris. Sauf que pour positiver un peu, je me demande si ce fiasco ne peut pas avoir d’autres bénéfices sur d’autres marchés : celui de l’achat de vélos par exemple ? Impossible d’avoir des chiffres mais, le fléau des Vélibs pourrait avoir augmenté l’achat d’un vélo pour les Franciliens. Même chose pour tous les Go bee Bike et autres vélos itinérants que vous voyez un peu partout dans la capitale. C’est un véritable fiasco aussi et cela mériterait une chronique mais, c’est aussi l’occasion de voir fleurir de nouveaux marchés.
C : Merci Angèle Chatelier, pour ces précisions sur le fiasco du Vélibs, même si l’on ne sait pas encore quand ils vont définitivement revenir. A très vite,
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