«Être ou ne pas être, là n’est plus la question. » C’est Benny Andersson, ou plutôt son double numérique, qui résume parfaitement ce qu’est la nouvelle vie d’ABBA en 2022 dans le show ultratechnologique que le groupe suédois a installé à Londres depuis le mois de mai (lire l’épisode 1, « ABBA, le groupe qui ne voulait pas mourir »). Pendant que les quatre septuagénaires vivent leur vie rangée tranquillement chez eux, leur avatar rajeuni se produit presque tous les soirs devant des milliers de personnes et entretient ce qui est devenu la grande quête d’éternité du groupe : passer de génération en génération. Ça a marché avec Gold, leur best-of de 1992 qui a redéfini cet exercice poussiéreux (lire l’épisode 2, « “Gold” : ABBA, un peu plus près des étoiles »), fonctionné encore par deux fois avec Mamma Mia!, sous la forme d’une comédie musicale puis d’un film qui ont fait le plein dans les années 2000 (lire l’épisode 3, « ABBA revient dans la cour d’écran »). Le processus est bien parti pour se renouveler en 2022 avec Voyage, devant les petits-enfants de leurs fans des années 1970.
Ils pensent artistique et business en même temps et ils ont décidé de s’attaquer à leur héritage de leur vivant, c’est passionnant à voir.
Mais après ? ABBA peut-il être un groupe éternel ? Est-ce que, lorsque nous aurons achevé de détruire la planète, leurs avatars continueront à chanter Dancing Queen tous les soirs dans les ruines de Londres, dans un remake disco de La Planète des singes? Quand j’ai demandé à Svana Gisla, la coproductrice de Voyage avec Ludvig Andersson, le fils de Benny, si le spectacle pourrait survivre au groupe, elle s’est montrée gênée mais clairement ouverte à l’idée.