Ces derniers mois, j’ai passé des heures dans un lieu incontournable pour les conspirationnistes : l’appli Telegram. En m’abonnant à des groupes de discussion, appelés « canaux », j’ai pu y voir des tas de gens argumenter sur l’existence d’êtres extraterrestres qui nous dirigent, sur la platitude de la terre et, bien sûr, sur un complot mondial derrière la pandémie de Covid-19. La plupart du temps, je me suis contenté d’observer les débats. Parfois, tout de même, j’ai posé quelques questions basiques. Cela a suffi à attirer des gens d’une bienveillance tout à fait commerciale.
En février dernier, j’assiste à une séance de méditation groupée – appelée « colonne bouddhique » – organisée sur un canal Telegram réunissant plus de 1 600 personnes. Plusieurs fois par semaine, une partie des participants se coordonnent pour répéter les mêmes formules, du genre : « Je demande ici et maintenant au feu blanc de consacrer tout mon être à la Lumière. » Cela renforce selon eux leur « bouclier de protection » et permet en prime de « maintenir la fréquence vibratoire de la Terre ». À la fin de la séance, un homme informe le groupe d’une bonne nouvelle : « Luc Bodin dit que le pourcentage d’amour sur terre a augmenté de 23 %, il serait passé à 60 % en l’espace de trois mois. » Ce message reçoit une pluie de félicitations et d’emojis en forme de cœur.