Valneva pourrait devenir sous peu un nom connu du grand public. L’entreprise de biotechnologies franco-autrichienne basée à Nantes développe un candidat vaccin contre le Covid-19 dont les essais sont entrés dans leur phase finale. Elle s’appuie sur une technique prometteuse, le virus désactivé, radicalement différente de celle de l’ARN messager. Créée en 2012, la biotech n’est pas une nouvelle venue dans les maladies infectieuses : elle planche aussi sur des candidats vaccins contre le chikungunya et la maladie de Lyme. Mais dans la course de vitesse contre le coronavirus, Valneva servira en premier le Royaume-Uni. Londres a financé ses efforts de recherche dès septembre 2020 et a déjà précommandé un total de 100 millions de doses– pendant ce temps, l’Union européenne mène des négociations pour 60 millions de doses. D’ailleurs, sans attendre, la production vient tout juste de démarrer… à Livingston, en Écosse. Après le gros retard pris par Sanofi (lire l’épisode 10, « Sanofi atrophie la souveraineté sanitaire ») et l’abandon du principal programme de recherche de l’Institut Pasteur, l’exemple Valneva signe un nouvel échec de l’État français à soutenir les projets permettant de sécuriser l’approvisionnement en vaccins sur son territoire.
La présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, lors d’un point sur l’épidémie de Covid-19 à Bruxelles, le 1er octobre 2020
— Photo Johanna Geron/Pool/Epa/via MaxPPP.
Face aux difficultés de production affichées par les laboratoires américain Pfizer et le britannico-suédois AstraZeneca, la puissance publique se retrouve très démunie. Jouant la carte de l’opinion publique – enpubliant notamment le contrat qui lie l’Union européenne (UE) au second –, la présidente de la Commission, Ursula von der Leyen, a multiplié les prises de parole, haussé le ton et fini par obtenir une rallonge de 9 millions de doses du vaccin AstraZeneca. Mais sur les 300 millions préachetées par l’UE, cela porte seulement à 40 millions, pour l’instant, le nombre de doses garanties. Et le labo, qui a développé son vaccin avec l’université d’Oxford, tente de réserver celles produites sur le sol britannique… pour le marché britannique. En France, à l’issue d’une réunion rassemblant les laboratoires producteurs de vaccins et deux commissaires européens ce mardi 2 février au soir, Emmanuel Macron a promis la vaccination «d’ici à la fin de l’été» à «tous les adultes qui le souhaitent», mais sans annoncer un contingent de doses supplémentaires à l’appui. Quatre entreprises françaises devraient toutefois ouvrir «progressivement»des lignes de production d’ici à «fin février-début mars», selon le chef de l’État.
La France est le seul pays à prétention scientifique dont la dépense d’investissement en recherche et développement ne bouge pas.
La pandémie de Covid-19 rappelle, dans la douleur, le rôle stratégique de la recherche : lorsque l’État la finance de façon significative, elle lui donne des leviers sur les décisions des laboratoires.