De Londres
Il passait juste par là, quelques jours de vacances avec sa femme Maria, et il a vu les caméras. Des dizaines et des dizaines d’objectifs pointés sur ce bâtiment gothique blanc, juste en face de la Chambre des communes. C’est l’effervescence, ce mardi, devant la Cour suprême britannique, la plus haute instance du pays. Alors Martin Nye, sac au dos et polo bleu et blanc, se poste devant les grilles, entre les manifestants pro et anti-Brexit. Et il attend. Le chauffeur de bus venu de la banlieue de Birmingham tient mordicus à ce que le Parlement reste suspendu (lire l’épisode 1, « Brexit : the final countdown »). « Je fais confiance au jugement de Boris Johnson, il a prorogé le Parlement pour accomplir, enfin, le Brexit. » On lui dit que ça y est, la Cour a parlé, que la décision est prise, que les onze juges considèrent que la suspension de la Chambre pour cinq semaines est illégale, nulle et non avenue.
Les effets de la suspension sur notre démocratie étaient extrêmes. Aucune justification pour accomplir de telles actions n’a été présentée à la Cour.
La mine s’assombrit. « Ce n’est pas une bonne nouvelle, hein », regrette Maria, lunettes et cheveux blonds bouclés. Mais la baronne Lady Hale a parlé. Une juge façon Harry Potter, toute de noire vêtue avec, sur l’épaule, cette broche araignée qui semble vouloir grimper dans ses cheveux gris. « Les effets de la suspension sur notre démocratie étaient extrêmes, affirme la juge. Aucune justification pour accomplir de telles actions n’a été présentée à la Cour. » Et voilà. Décision unanime et historique des juges. En substance, quand Boris Johnson, le 28 août dernier a demandé à la reine de suspendre le Parlement, c’était sans raison valable, si ce n’est celle de l’empêcher d’exercer sa mission de contrôle du gouvernement.

« Nous, nous faisons partie de la classe ouvrière, et autour de nous, tout le monde a voté pour quitter l’UE, explique Martin. Notre député est aussi pour le “Leave” mais le reste du Parlement veut empêcher le Brexit. Franchement, que vont changer quelques semaines de discussions en plus, alors qu’ils n’ont rien décidé en trois ans ! » Sa Majesté est sûrement bien embarrassée, elle qui a suivi sans sourciller l’avis de son Premier ministre, comme le prévoient la coutume et la Constitution