De Londres
Quelques pas, poignée de main, sourire caméra, selfie. Quelques pas, poignée de main, sourire caméra, selfie. Au milieu des stands Google, EDF, Airbus… Jacob Rees-Mogg tient un rythme effréné. Raie sur le côté et nuque raide dans son costume sur mesure, le ministre en charge des Relations avec le Parlement est la coqueluche du congrès de rentrée des conservateurs à Manchester. Il a le pouvoir magique de saturer les salles de conférence par la seule force de son nom et de réveiller par ses mots un auditorium en pleine torpeur post-déjeuner. Discours officiel applaudi debout. Cascades de rires à chaque plaisanterie. Mieux qu’Oasis et The Smiths, groupes cultes de Manchester. Enfin une rockstar diplômée d’Eton et d’Oxford, père de six enfants, plus traditionaliste tu meurs. Allure dégingandée, ton aristocratique…
Rient-ils de lui, ou avec lui ? En tous cas, son discours débine ses concurrents. Jeremy Corbyn, le patron du parti travailliste, « a réussi le tour de force d’être plus impopulaire dans son parti que dans le nôtre ». Jo Swinson, la dirigeante des libéraux-démocrates qui voudraient annuler le Brexit, serait une « démocrate par son nom seulement, pas par sa nature ». Nigel Farage, le fondateur du Brexit party, est « admirable par bien des aspects, et parce qu’il a envoyé à Bruxelles l’un de nos meilleurs politiciens, en l’espèce ma sœur [Annunziata Rees-Mogg, ndlr]. Mais voter pour lui, c’est augmenter nos chances de ne pas avoir de Brexit ». Les députés ne sont pas oubliés : « Ce Parlement méprise le peuple. Mesdames et messieurs, ils vous méprisent, vous. » Ambiance.

Il y a dans le parti conservateur une fracture que les cadres s’ingénient à amplifier. Les députés rebelles anti-Brexit dur, qui ont eu le courage de faire le déplacement à Manchester, reçoivent ainsi un accueil pour le moins mitigé. Tel Dominic Grieve, qui fait partie des vingt élus exclus pour avoir voté une loi obligeant Boris Johnson à un report si aucun accord n’était trouvé (lire l’épisode 2, « Pour Boris Johnson, c’est trois non par semaine »)
Cette ambiance, c’est dangereux, extrême. Les deux camps doivent surveiller leur langage.
C’était le lundi 30 septembre, à 8 h 15, dans une petite salle près des toilettes du centre de conférences de Manchester.