« Station Eleven » et la recherche d’essence
Fin du monde. Chaque vendredi midi, « Les Jours » vous parlent effondrement et culture. Aujourd’hui, un roman d’Emily St. John Mandel.
Un homme meurt (d’une attaque), puis des milliards (d’une grippe foudroyante)
Dans Station Eleven, la Canadienne Emily St. John Mandel ne perd pas de temps pour nous plonger, délicatement mais sûrement, la tête dans le seau
S’ensuivent des allers-retours entre la période actuelle et l’An 20 après le cataclysme
Parmi ceux qui ont survécu – 1 % de la population –, les membres de la Symphonie Itinérante, une troupe de comédiens et de musiciens, dans la région des Grands Lacs
Grâce à Shakespeare, aux comics, aux instruments de musique, à Star Trek, un fil subsiste entre l’avant et l’après : c’est l’art
Mais évidemment, tout a changé
Extrait :
Dystopie élégiaque et à suspense – comment les caravanes ont-elles pu soudain disparaître ? Qui est l’étrange prophète qui tient la ville de St Deborah by the water ? –, le roman se double d’une réflexion sur nos objets technologiques
Avec un humour parfois cruel, Emily St. John Mandel pointe leur vanité, leur inanité… mais, laissant de côté les considérations écologiques et la crise énergétique vécue par ses personnages, elle rappelle également leurs pouvoirs magiques
On s’étonne ainsi de s’émerveiller au décollage d’un dernier avion, rempli de passagers aventureux, qui vont tenter leur chance dans un ailleurs plein de dangers
Car après tout, qu’y a-t-il de fascinant dans la fiction post-apocalyptique ? Sans doute la notion de recommencement, la quête de l’essence humaine
Le lecteur peut se réinventer en pionnier, en explorateur, en démiurge, en navigateur qui se lance sur l’eau sans savoir s’il y aura une île quelque part, en premier habitant de l’Île de Pâques ou de l’Islande
En créateur d’un nouveau monde, plus juste
Celui de Station Eleven est noir et plein d’espoir
À lundi (si on tient jusque-là).